Le Sunside dit " Thanks a Million " à Eric Le Lann & Paul Lay
" Thanks a Million "
Eric Le Lann & Paul Lay
Le Sunside. Paris.
Samedi 15 décembre 2018. 21h30
Eric Le Lann: trompette
Paul Lay: piano
Lectrices Hot, lecteurs Swing, nous avions laissé Eric Le Lann & Paul Lay en quintet vivre leur " Life on Mars ". C'était en 2015. Nous sommes en 2018 et les deux musiciens rendent hommage en duo à Louis Armstrong avec l'album " Thanks a million " qui sera prochainement chroniqué sur ce blog.
Eric Le Lann a déjà enregistré deux duos avec des pianistes. " Trois heures du matin " en studio avec Michel Graillier (1996) et " Portrait in Black and White " en concert avec Martial Solal (1999). C'est dire si ses goûts sont raffinés. Paul Lay succède à des Maîtres.
Le pianiste pose l'ambiance. Un Blues lent. Le Blues, forcément pour le Roi du Jazz, Louis Armstrong. Paul Lay accélère, fait tintinnabuler le piano. Je reconnais " Dinah " (cf extrait audio au dessus de cet article). Ca chante même si Eric ne chante pas. Sa trompette chante pour lui. Le jeu de trompette est plus classique que celui de piano. Deux générations dialoguent autour du Grand Ancien. Belle attaque. Ca pince fort sur l'embouchure. Eric & Paul sont pris dans la danse qu'ils créent mais en restent maîtres. Solo de piano chantant. Ca swingue, sapristi! Eric vient ajouter de l'émotion, de la déchirure.
" Mack the knife ". Sourdine Harmon. Eric introduit ce fameux thème sur lequel Louis Armstrong a marqué sa griffe à jamais. Version lente. Solo de piano bluesy à souhait. Dès qu'Eric joue, il y a plus d'émotion.
Le duo attaque sur un air vif. Je ne connais pas ce thème mais ça balance bien. Solo de piano rapide, bien charpenté. Ca repart en duo endiable jusqu'au final. C'était " Jubilee ".
" Tight like this ". Intro au piano. Un solo grave. Le Blues, toujours le Blues. Ce sont les morceaux de Louis Armstrong mais Paul Lay et Eric Le Lann se les approprient ne copiant ni Earl Hines, ni Louis Armstrong. Copierait-on les pyramides d'Egypte ou les cathédrales gothiques d'Ile de France? Eric & Paul se nourrissent de cette musique et nous la restituent neuve et différente. Ca accélère serré. " Tight like this ". Le titre est clair. Le pianiste accélère en solo. Retour au thème. Un Blues lent, méditatif.
Un Blues lent. Thème inconnu de mes services. Le jeu du pianiste, en solo, augmente la taille du piano. Bref, Paul Lay sort le grand jeu. Je ne suis pas le seul à hocher la tête, pris par la musique. Solo de trompette final poignant. Direct au cœur. Au fait, c'était " Body and Soul " un standard joué des milliers de fois mais si bien revisité que j'ai eu bien du mal à le reconnaître.
" Louison " (Eric Le Lann). Eric Le Lann, Breton et Jazzman rend hommage en même temps à Louis Armstrong et Louison Bobet, triple vainqueur du Tour de France (1953, 1954 & 1955). Un petit air vif, enflammé. Jeu à flux tendu entre piano et trompette. Solo magique du pianiste. Comme une transe fraîche et tranquille. Cette antinomie s'accomplit sous les doigts de Paul Lay.
PAUSE
A la pause, un jeune Américain enlaçait sa bien aimée tout en lui détaillant les notes jouées: B flat (si bémol), C sharp (do dièse). Charmant.
" Thanks a million ", le titre album. Le duo repart. Un air tranquille. Eric Le Lann vise toujours aussi précis. En plein cœur. Solo planant du piano. Un arrangement modal, façon années 60.
" Farewell to Louis " (Paul Lay). Un Blues lent. Superbe attaque de la trompette. Ca mord. Un peu de vibrato. Final en piano solo pour dire au revoir à Louis.
" Saint James Infirmary ". Un des premiers thèmes que l'on apprend quand on joue New Orleans explique Eric Le Lann. 1er enregistrement par Louis Armstrong en 1928. Version française par Eddy Mitchell en 1965 (" J'avais deux amis "). Eric Le Lann l'apprit de son père, dentiste de profession et trompettiste Nouvelle Orléans par passion. C'est l'histoire d'un type qui retrouve sa chérie à la morgue. Un Blues poisseux et puissant. Joué avec l'intensité nécessaire.
Solo de trompette véhément en introduction. " The man I love " en version rapide. Le pianiste enchaîne. Toujours touchant. Solo de piano musclé, charpenté avec des trilles de notes distillées avec goût. Il y a une descendance de Martial Solal qui interprète ce standard comme personne.
" Azalea " une ballade qui figure sur le fameux album " The Great Summit." (1961) qui réunit Louis Armstrong & Duke Ellington. Indispensable dans une discothèque. Sourdine Harmon. Une ballade. Le pianiste doit succéder à Duke Ellington. Le trompettiste à Louis Armstrong. Ne pas se laisser intimider. Une belle ballade en effet, fleurie à souhait.
" Just one of those things " (Cole Porter). C'est bien ça. Air enflammé. Une chanson d'amour vache. " Pour toi, notre amour était juste une de ces choses ". Le duo reste bien soudé sur le thème.
Lectrices Hot, lecteurs Swing, suivez le duo Paul Lay & Eric Le Lann jouant Louis Armstrong. Vous vous régalerez sans modération et, à votre tour, vous direz " Thanks a million ".