The Art of the Quartet civilise le Duc des Lombards

Publié le par Guillaume Lagrée

Scott Colley par Juan Carlos HERNANDEZ

Scott Colley par Juan Carlos HERNANDEZ

The Art of the Quartet

Le Duc des Lombards

Paris, Ile de France, France

Mercredi 22 mai 2019. 19h30

The Art of the Quartet est composé de:

Kenny Werner: piano

Scott Colley: contrebasse

Peter Erskine: batterie

Benjamin Koppel: saxophone alto

 

Un standard moderne de Wayne Shorter. Très élégant, aérien, comme il faut. Batteur aux baguettes, en finesse. Le temps se décompose progressivement. Solo de sax qui accélère en douceur, poussé par la rythmique. Retour au thème, toujours aussi planant. Solo de contrebasse ponctué par des cliquetis de cymbales aux baguettes. Ca repart sur le thème. Le pianiste improvise seul, sur le thème, encore plus mystérieux et aérien. La magie Kenny Werner opère. 

Le quartet embraye sur un autre thème. Toujours aussi léger, aérien. Personne n'applaudit. Le public reste attentif, concentré. Solo de contrebasse toujours ponctué par les baguettes par les cymbales. Une autre ballade. Le batteur reste aux baguettes. Le sax alto chante aigre doux. Les deux thèmes ont fini de s'enchaîner. Il est temps d'applaudir.

Ce n'était pas une composition de Wayne Shorter mais de Jozef Zawinul, " Directions ". A ma décharge, Wayne Shorter  joue un rôle essentiel dans l'interprétation qu'en donnait le groupe de Miles Davis en 1969. Puis " Sukiyaki " qui n'est pas un hommage à la gastronomie japonaise mais un arrangement d'une chanson Pop des années 1960.

Deux compositions du contrebassiste Scott Colley. D'abord, un Blues. La rythmique tourne. Le sax alto joue la surprise, attaque par instants. Ca s'énerve tranquillement. Ce n'est pas le Blues échevelé d'Archie Shepp. Solo de piano. Blues tranquille soutenue en douceur par la rythmique. Le batteur reste aux baguettes. Solo de batterie aux balais, en douceur. Sans forcer, comme il faut. La contrebasse impulse. Beau dialogue entre bassiste et batteur. A chacun son tour de parole. Ils ne s'interrompent pas comme des politiciens dans un débat électoral.

Un solo de Kenny Werner pour commencer. Le quartet reprend doucement. Batteur aux balais. Nous parlons d'un Maître, Monsieur Peter Erskine. Il glisse comme un patineur. Le sax déroule un son sinueux. Solo de piano massé par les balais du batteur. Le quartet reprend une ballade nostalgique à souhait. Un concentré de précision et d'émotion.

" White baby suit " (?). Une composition de Peter Erskine pour sa fille. Mon voisin de gauche est un malotru. Il répond au téléphone comme s'il écoutait un album dans son salon. Il explique à sa femme qu'il est au Duc des Lombards (information qui ne m'avait pas échappé), qu'il ne peut déplacer la voiture et qu'il s'en occupera après. Après le concert, je suppose. Un sujet d'importance vitale qui ne pouvait attendre la fin du concert. Depuis que les téléphones portables existent, j'ai déjà vu des spectateurs filmer et enregistrer avec, lire les nouvelles des gazettes, envoyer des messages écrits à leurs amis et amours mais répondre à voix haute en plein concert, jamais. Ne pouvant interrompre le concert pour suivre cette passionnante conversation, j'ai préféré interrompre mon voisin pour suivre ce superbe concert. Il a demandé pardon, s'est présenté et nous sommes partis en bons termes.

Reprenons. Un morceau vif comme une petite fille espiègle. Ca s'agite franchement sur un air caribéen. Ca sonne Calypso. Ce sera justement le thème de ma prochaine émission Le Jars Jase Jazz sur Couleurs Jazz Radio en juin 2019 le vendredi à 1h et 19h, le samedi à 1h, le dimanche à 18h (heure de Paris): Le Jazz flèche de l'arc caraïbe (la Caraïbe anglophone).

Nouveau dialogue contrebasse & batterie. Peter Erskine tapote les bords de caisse aux baguettes sur un rythme implacable. Il fait chanter et rouler les tambours en ponctuant finement aux cymbales. Le Maestro est à l'oeuvre. Tout de suite, je comprends pourquoi tout le monde joue avec Peter Erskine depuis plus de quarante ans. Le quartet repart sur cet air caribéen.

Morceau composé pour le le film " Hamlet " de Laurence Olivier. Ce prince danois qui n'a jamais existé mais que William Shakespeare a rendu si vivant que vous croyez le croiser au château d'Elseneur. Scène d'amour. Un soldat dit adieu à son épouse. Batteur aux balais. Ballade nostalgique. Des adieux émus, cela s'entend.

Après un tel final, il n'y a rien à ajouter. Pas de bis.

Lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs, vous pourriez craindre que The Art of the Quartet soit une addition de stars sans âme, ni esprit d'équipe, réunies pour faire beau sur l'affiche et attirer le public, les médias, les sponsors, comme certaines équipes de football. Pas du tout. Chaque musicien est un leader de très haut niveau, reconnu internationalement. Ils ont juste plaisir à se réunir, à jouer ensemble, à se stimuler, à se sublimer et nous le font partager sur scène. Profitez en sans restriction.

Pour vous faire une idée plus précise de l'Art de ce quartet, savourez la vidéo ci-dessous enregistrée en concert à Ascona (Tessin, Suisse) le 20 mai 2019, soit 2 jours avant ce concert parisien.

 

La photographie de Scott Colley (2005) est l'oeuvre du Resplendissant Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales. 

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