Ben Sidran Quartet avec Rick Margitza au Sunside: le coup de pied de l'âne à l'éléphant

Publié le par Guillaume Lagrée

Ben Sidran Quartet

avec Rick Margitza

Paris. Le Sunside.

Jeudi 31 octobre 2019. 21h30.

En concert à Paris, au Sunside, vendredi 1er et samedi 2 novembre 2019 à 21h30.

Ben Sidran: piano, voix

Billy Peterson: contrebasse

Leo Sidran: batterie

Rick Margitza: saxophone ténor

La dernière fois que j'ai été écouter Ben Sidran en concert à Paris, c'était avant 2010 avec une New Yorkaise, une demoiselle Erin qui refusait de croire que Michael Legrand était Français et se prénommait Michel. Elle s'est sentie at home lors de ce concert. Je n'étais pas l'homme de sa vie. Ni remords ni regret.

La rythmique attaque funky. Chanson à message. " You've got to take a look at the American dream ". Au sax de chanter. Rick Margitza est dans la place. Tout baigne. Le quartet est tout de suite au rythme de croisière. Batteur aux balais pour un solo bien frotté de contrebasse. C'était " Let's make a deal ".

Bonne pulsation funky. Rick Margitza, avec son PhD de la Miles Davis University, est tout à fait à l'aise sur ce genre de rythme. Ben Sidran nous raconte, à sa propre douce manière, " The language of the Blues ". Ben Sidran ne joue pas des standards mais ses chansons qui sont la prolongation de son travail de producteur, enseignant, animateur, historien du Jazz. Dès qu'il cesse de chanter, le sax ténor de Rick Margitza décolle. La rythmique soutient tranquillement. Rick Margitza est au dessus bien entendu. Parce que le sax ténor est un instrument aérien et parce que Rick Margitza est le dernier saxophoniste de Miles Davis, sapristi! Rick n'est pas un Bluesman mais il sait jouer la Note bleue.

Manifestement, Ben Sidran est un électeur démocrate. Juif, universitaire et Jazzman, s'il n'était pas Démocrate, ce serait surprenant. Il nous explique que le rêve américain est fini. Les Américains ont grandi, sont devenus adultes et ont leur propre dictateur. Il ajoute une pensée de feu Johnny Griffin, saxophoniste ténor avec qui il joua: Quand vous décidez d'aller bien malgré les mauvaises conditions, alors vous avez besoin de Jazz. 

Une chanson de 1933: Drop me off in Harlem (Duke Ellington) Pas de paroles à l'origine mais elle furent ajoutées puisque Louis Armstrong et Ella Fitzgerald les chantèrent avec Duke Ellington. Batteur aux balais. Ca swingue. Rick Margitza se prend pour Ben Webster. Le piano scintille comme il faut. Rick joue le Blues style années 30 mais modernisé. Impeccable. Dans l'esprit, pas dans la copie. 

Ben Sidran évoque un poème de l'Espagnol Federico Garcia Lorca sur New York en 1929, juste avant la Grande Dépression. Chanson inspirée par ce poème. Les tambours roulent sous les mains de Leo Sidran, le fils de Ben. C'est le rythme de New York. Une sorte de rap sur du Jazz. Le piano tourne en boucle. Le batteur pulse sur sa charleston. Rick ajoute un voile de Blues. Ils jouent la pulsation folle, incessante de la ville qui ne dort jamais. La rythmique tourne toujours et le sax ténor tranche dans le vif.

Ben commence seul en jouant et en chantant. Une ballade. La rythmique reprend. Batteur aux balais. Solo de contrebasse bien glissant entre piano et batterie. Rick reprend la main avec autorité. Il cite un standard " Cry me a river " (" Pleurer des rivières " en version française). Final bien funky à 4.

Ben Sidran, en historien de la musique, nous explique que les flûtes en os trouvées dans les grottes de Lascaux sont accordées en gamme pentatonique, celle du Blues. Donc, il y a 45 000 ans, les hommes avaient déjà le Blues! Il ajoute que son chien n'a pas le Blues. Il connaît la nourriture. Il sait chasser les écureuils mais il ne connaît pas le Blues. Nous avons le Blues parce que nous sommes humains. 

Ben Sidran joue et chante seul le Blues. Un Blues politique. " You and me are the minority ". Le quartet enchaîne. Batteur aux baguettes. Rick déploie ses ailes et plane au dessus de la rythmique. 

Ben Sidran introduit seul une ballade. La rythmique enchaîne avec le batteur aux balais. Une sombre histoire d'étoiles. Rick Margitza joue le Blues. Cet Américain, domicilié en France, descendant de Tziganes de Hongrie, sait jouer le Blues.

Attaque funky. Gros son de contrebasse. Batteur aux balais. Ben nous explique qu'il n'y a que deux chansons. L'une est le Blues, l'autre ne l'est pas. Ici un Blues de Mose Allison (1927-2016) pianiste natif de Tippo, Mississipi. " I don't care about anything cause I know nothing is gonna be all right ". Bonne définition du Blues. Un Blues joyeux, ironique, rythmé. " L'humour est la politesse du désespoir " (Chris Marker). Ca tourne au boogie woogie, le vrai, avec du feeling. Rick chuinte à souhait pour jouer le Blues. 

PAUSE

Leo Sidran bat le rappel. Son père enchaîne au piano. C'est toujours aussi funky. " Big Brother ". Une chanson sur la surveillance électronique globale. Un Blues classique dans la forme mais pas sur le fond. " Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques " (André Chénier). Ca sonne diablement funky avec Mr Rick Magitza au saxophone ténor. 

Une chanson de Bob Dylan. " Everything is broken ". Cf vidéo sous cet article. Rick Margitza reprend sonnant comme un disciple d'Hank Mobley. Le Blues n'est pas une question de couleur mais de feeling. Rick Margitza l'a. Pas étonnant que Miles Davis qui jouait toujours le Blues, quel que soit le contexte, l'ait recruté comme dernier saxophoniste. 

Une chanson de Ben Sidran. " Don't cry for no hipster ". Toujours le Blues. Ben Sidran introduit seul au piano. La rythmique reprend avec le batteur aux balais. Solo de contrebasse bien pétrie par Billy Peterson. Rick enchaîne avec un gros son, le vibrato qu'il faut. 

Ben Sidran explique ses chansons. " Big Brother " c'est parce que nous ne cherchons pas sur Google, c'est Google qui nous cherche. " Sois positif " dit Léo à son père. " Don't cry for no hipster " c'était positif répond Ben à son fils. Il ajoute que la chanson suivante est, elle aussi, positive.

" Picture him happy ". Cf extrait audio au dessus de cet article. Tic tac de la batterie aux baguettes. Le quartet installe le groove. A nous de hocher la tête et de dire Yes. Rick crée une contre mélodie. Il se lance. Le piano accompagne en ostinato, avec un feeling latino.

Ben Sidran nous explique Bob Dylan, prix Nobel de littérature. Ce qu'il y a de bien dans la musique de Bib Dylan, c'est que personne ne comprend rien à ce qu'il dit. Honnêtement, je ne change pas les paroles. Peut-être les comprendrez vous pour la première fois. Jeu très funky. Une sorte de rap. Une chanson politique. Pas la plus connue des chansons de Robert Zimmerman, natif de Minneapolis, Minnesota, comme Prince. Bon rythme de marche accélérée.

Un nouvel air funky. " Tangle up and Blue ". Petite citation de " Jean-Pierre " de Miles Davis dans le solo de Rick Margitza, " Jean-Pierre " étant lui même une variation sur la vieille berceuse française " Dodo, l'enfant Do ". 

Une autre chanson de Bod Dylan. " Love minus Zero ". Quand on demande à Bob Dylan ce que signifient ses chansons, il répond: " Pourquoi me le demandez vous? Je suis le dernier à qui il faut le demander! " . Une chanson d'amour.

Un air funky, un peu latino. Rick adopte son jeu à ce feeling. Je bats la mesure du pied droit comme mon voisin de derrière dont le pied dépasse. Un morceau instrumental. Rick décolle bien poussé par la rythmique. Solo de contrebasse. Grosse vibration. Pianiste et batteur décortiquent le tempo. Ben Sidran dit " Leo " et son fils se lance dans le premier solo de batterie du concert. En souplesse.

Un Blues. " Times get tougher and tough. Things get rougher and rough ". 

PAUSE

Le quartet est chaud pour jouer un 3e set. J'ai eu ma dose de beauté. La chronique est finie. Rick Margitza n'est pas le saxophoniste habituel de Ben Sidran mais il vit à Paris. De passage en ville, Ben Sidran lui a demandé de jouer dans son quartet. Rick a accepté et le résultat est délectable.

Le quartet de Ben Sidran joue à Paris en France, avec Rick Margitza, au Sunside vendredi 1er et samedi 2 novembre 2019 à 21h30.

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