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" One Too " Lucy Dixon & Le Professeur Inlassable

Publié le par Guillaume Lagrée

Lucy Dixon et Le Professeur Inlassable

Plus Loin Music. 2010.

Lucy Dixon: chant, boîte à rythmes, percussion corporelle, claquettes

Le Professeur Inlassable: platines, production

Divers musiciens indiqués dans l'album.

C'est le printemps. L'heure d'été. Les soirées s'allongent. Vous recevez chez vous amis et amours pour qui vous aurez préparé des victuailles savoureuses et des boissons délicieuses. Que mettre en fond sonore pour rendre l'ambiance plus attrayante? 

Ne cherchez plus. Vous avez trouvé. Lucy Dixon et le Professeur Inlassable l'ont réalisé pour vous. " One too"! " A beautiful day " pour saluer les délices du jour. " Dame blanche " en hommage à la dame de vos pensées, lecteurs courtois. " Quinze centimes " si vous êtes fauchés comme les blés. " Paname " parce que Paris sera toujours Paris.

Nihil novi sub sole diront les esprits grincheux. Ce n'est pas le but en effet. Il s'agit d'easy listening, de musique légère, qui n'a d'autre prétention que de nous rendre la vie plus douce et plus agréable le temps de quelques dizaines de minutes de musique. Pari tenu.

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Leçon de Jazz d'Antoine Hervé: les deux quintettes historiques de Miles Davis

Publié le par Guillaume Lagrée

 

 

 

Leçon de Jazz d’Antoine Hervé. « Les deux quintettes historiques de Miles Davis »

Paris. Auditorium Saint Germain des Prés. Lundi 11 avril 2011. 19h30.

 

La photographie d'Antoine Hervé est l'oeuvre du Resplendissant Juan Carlos HERNANDEZ.

Antoine Hervé

Antoine Hervé : piano, explications

Michel Benita : contrebasse

Philippe Garcia : batterie

Eric Le Lann : trompette

Stéphane Guillaume : saxophones alto, ténor

 

Je transcris ici les propos du Professeur Antoine Hervé tel que je les ai notés et compris. Toutes les éventuelles erreurs techniques sont évidemment miennes.

 

Le Miles des années 50 avec Le Lann, ça le fait. Il ne copie pas, il joue le thème à sa manière. Ca swingue dur ! Stéphane Guillaume est à l’alto dans le rôle de Julian « Cannonball » Adderley. Lui aussi, il donne. La rythmique swingue dur et bluesy comme l’aimait Miles Davis. Retour au thème groupé. Petits échanges saxo/trompette ponctués par le batteur. Back to the 50’s ! C’était « Solar ». Ajoutez y un « » et vous obtenez MC Solaar, célèbre fan de Miles Davis.

 

Miles Davis était le fils d’un chirurgien dentiste. Eric Le Lann aussi. Miles était beau gosse comme son rival Chet Baker. Miles jouait très droit parce que son professeur Elwood Buchanan lui avait dit de ne pas imiter Rex Stewart : «  Pas de vibrato, Miles ! Tu vibreras quand tu seras vieux ». Miles est mort à 65 ans en 1991 et il n’a jamais joué en vibrato.

 

Miles a commencé par le Be Bop avec Charlie Parker. C’était un militant de la cause noire. Premier concert à Paris en 1949. Il rencontre Boris VianJean-Paul Sartre et noue une liaison avec Juliette Gréco. Elle avait sa carrière à Paris, il avait sa carrière à New York. Cet amour impossible se résolut en une amitié qui dura toute la vie de Miles.

 

Pour Miles, une nuit à jouer au Minton’s (le club où naquit le Be Bop) valait une année de formation à la Julliard School of Music. En 1948 il lança le cool avec John LewisGil EvansLee KonitzGerry Mulligan (album « Birth of the cool »). Dans les années 1950, naissance du Hard Bop avec Art Blakey et les Jazz Messengers. Miles y participe aussi.

 

Enfin, de 1955 à 1961, John Coltrane joua avec Miles Davis (sauf en 1957 où chassé de l’orchestre pour cause d’addiction aux drogues dures, John alla se ressourcer chez le Prophète Thelonious Sphere Monk).

 

Le groupe joue « Milestones », un morceau qui marque les débuts du Jazz modal. Le batteur n’a pas la souplesse, l’élégance de « Phillly » Joe Jones et de ses fameux « Philly licks ». Stéphane reste à l’alto. Solo bref et dense d’Eric dans l’esprit de Miles.

 

1959 : naissance d’Antoine Hervé. Sortie de l’album « Kind of Blue » de Miles Davis chef d’œuvre reconnu par la critique et par le public. Antoine nous explique le Jazz modal. Démonstration de gamme occidentale classique puis de gamme Blues. DebussyRavelStravinky ont fait du modal. Ca se faisait aussi dans le Jazz West Coast. En sol, sur les notes blanches du piano, cela donne « All Blues ». Stéphane continue à l’alto. Eric a mis la sourdine Harmon surnommée la sourdine Miles tant ce son lui est attaché. Les notes, le temps s’étirent. Comme me l’a dit un ami à qui j’ai fait découvrir cet album : « La première fois que j’ai entendu Kind of Blue, j’ai eu envie d’écrire mes mémoires de privé ». Cette musique est noire comme la nuit, le polar, la peau des musiciens sauf le pianiste, Bill Evans. A des musiciens noirs qui lui reprochaient d’avoir engagé un pianiste blanc, Miles Davis répondit : « Je me fiche que Bill Evans soit blanc, noir, jaune ou vert à pois bleus. C’est le meilleur. »  Solo de trompette sans sourdine. Ca sonne. Le Lann est vraiment chez lui dans cette musique. La batterie est la pointe de la toupie. Autour, tout tourne. Eric remet la sourdine. Le groupe reprend le thème. L’album est un chef d’œuvre mais, là, je dois reconnaître que c’est vraiment bien joué. « Ce disque a été composé au Paradis » a dit Jimmy Cobb, le batteur de la séance.

 

Un jour de 1959, Dizzy Gillespie, demanda à Miles de lui offrir un exemplaire de « Kind of Blue ». Miles lui répondit : « Mais Dizzy, tu n’en as pas reçu un de la maison de disques ? » «  Si Miles mais je l’ai tellement écouté qu’il est déjà usé. »

 

« So What » basé sur un dialogue entre un prêcheur et une assemblée, comme dans la musique africaine et le Gospel. « So What ? » que l’on peut traduire par « Et puis ? » , « Et quoi ? », « Et alors ? » était une des expressions favorites de Miles Davis. Morceau basé sur le ré, en mode mineur. Lancé par un gros son de contrebasse. Groupe bien soudé. Le prêcheur, c’est la contrebasse. L’assemblée c’est le reste du groupe. Stéphane reste au sax alto. Beau solo d’Eric. La rythmique tourne. Le batteur est toujours le point fixe.

 

« Pourquoi jouer beaucoup de notes quand il suffit de jouer les plus belles ? ». «  Ce qui compte en musique, ce ne sont pas les notes, ce sont les silences entre les notes ». Miles Davis. Eric Le Lann explique le son, la technique de Miles. Miles a choisi une embouchure conique, longue, au diamètre serré montée sur une trompette très ouverte. Il a choisi de travailler le son en jouant peu de notes. Miles était un peintre qui travaillait la couleur. Il a d’ailleurs peint à la fin de sa  vie. Il était aussi surnommé « le Picasso du Jazz ».

 

Toujours extrait de « Kind of Blue », album inépuisable, « Blue in green ». Morceau basé sur la sequence 1, 3, 5, 9, 11, 13. Mi avec sol mineur. Le professeur Hervé nous explique la difference musicale entre Debussy et Miles. Miles écrivit l’ébauche de ce thème et Bill Evans le finit. Eric reprend la trompette bouchée. D’abord perçant puis voilé, brumeux. Il enlève la sourdine. L’obscurité prend d’autres teintes. Un Blues en vert et contre tous. Stéphane passe au saxophone ténor avec un gros son profond mais haut dans le registre de l’instrument. Retour à la trompette bouchée pour le final en quintette. Superbe.

 

Le professeur Hervé aborde maintenant le second quintette historique de Miles (1963 – 1968) avec Herbie Hancock(piano), Ron Carter(contrebasse), Tony Williams (batterie) et Wayne Shorter (saxophone ténor) qui ne rejoint le groupe qu’en 1964 mais ne le quitta qu’en 1970.

 

Premier album en 1963 : « Seven steps to heaven » avec George Coleman au saxophone ténor. Les petits jeunes de la rythmique sortaient le soir sans Miles. Un jour, Miles se fâcha et voulut sortir avec eux. Ils l’emmenèrent écouter la pianiste et chanteuse Shirley Horn. Miles resta fasciné. Son dernier enregistrement en sideman fut d’ailleurs sur un album de Shirley Horn (« You won’t forget me » en 1990). Après George Coleman, trop classique pour la rythmique (écoutez tout de même le « Live in Europe » enregistré au Festival d’Antibes-Juan-les-Pins) puis Sam Rivers, trop free pour Miles (album « Live in Tokyo »), Miles recruta Wayne Shorter que John Coltrane lui recommandait déjà comme successeur en 1960.

 

Ce quintette de Miles est le plus extraordinaire groupe du Jazz moderne pour Antoine Hervé. J’approuve. Cette musique est tenue entre la structure et l’improvisation, le classicisme et la liberté.

 

« Four » la version jouée en 1964 avec George Coleman. Remplacé ce soir par Stéphane Guillaume. On arrive ici aux limites du hard bop. Comme Miles, Eric s’éclipse de la scène pendant le solo de sax, de piano et revient pour conclure. Antoine Hervé joue à la Herbie Hancock, allegro virtuoso. Beau solo de contrebasse puissant, profond à la Ron Carter. « C’est grâce à ce son là que Ron Carter est payé un zillion de dollars » comme dit le batteur Ed Thigpen.

 

En décembre 1965, Miles Davis joue avec son quintette au Plugged Nickel à Chicago. C’est enregistré et disponible dans le commerce pour votre plus grand plaisir lectrices raffinées, lecteurs sélectifs. Parmi les standards joués figure « My Funny Valentine ». Chet Baker lui-même reconnaissait que Miles Davis jouait mieux ce morceau que lui. Duo piano/trompette. Eric est dedans. Antoine brode élégamment comme le fait Herbie. La rythmique s’ajoute doucement. La trompette griffe. Ce superbe solo n’est pas applaudi. Le groupe a installé le silence, l’attention. La rythmique balance, caresse, gifle. Ca chante. C’est ce qu’il faut.

 

Retour aux explications techniques. Dans les années 60, les accords de quarte sont à la mode notamment avec Mac Coy Tyner le pianiste de John Coltrane. On invente des superpositions d’accords à base de quartes. Miles compose « ESP » (Extra Sensorial Perception), titre album. ESP fut d’ailleurs le nom d’un label de Free Jazz, genre musical que Miles Davis détestait mais qu’il avait intégré avec Tony Williams et, par certains aspects, Wayne Shorter. Version vitaminée d’ESP. Stéphane Guillaume au sax ténor joue à la Shorter. Nous sommes pris dans le maelström de l’étrange.

 

« Nefertiti » inverse les rôles habituels du Jazz. Les cuivres jouent le thème en boucle. La contrebasse et le piano marquent le tempo. Le batteur s’éclate. Cela se passe comme annoncé. Si vous ne sentez pas ce que je veux dire, écoutez Nefertiti, sapristi ! Plainte répétitive de la trompette et du sax ténor marqué par le piano et la contrebasse. Le batteur, lui, se lâche. Morceau toujours aussi étrange, quarante-cinq ans après son enregistrement. Pas mal du tout.

 

Miles Davis savait s’entourer des meilleurs musiciens et les mettre en scène. C’était un Sorcier.

 

« Sorcerer » titre d’un album qui est resté comme surnom à Miles. Comme « Prince of darkness » tiré du même album. Le Lann a vraiment le son, la couleur qu’il faut pour jouer cette musique.

 

Fin de cette leçon de Jazz. Prochaine leçon à Paris, à l’Auditorium Saint Germain des Prés, le lundi 20 juin à 19h30 avec Glenn Ferris, tromboniste, pour raconter l’histoire du trombone dans le Jazz. Le titre de ce blog étant un hommage à un Géant du trombone, Jay Jay Johnson, j’y serai. Pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent venir à Paris, la Leçon de Jazz d'Antoine Hervé est aussi donnée en province et Outre Mer. Si vous ne sortez plus de chez vous, elle se trouve aussi en DVD. Bref, ne cherchez pas de prétexte. Pour votre instruction et votre divertissement, il faut suivre les Leçons de Jazz d'Antoine Hervé.

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Sylvaine Hélary se met à trois pour nous lessiver le 20 avril au Lavoir Moderne Parisien

Publié le par Guillaume Lagrée

La flûtiste, chanteuse, compositrice Sylvaine Hélary dont le talent n'a d'égal que la beauté m'a ébloui au sein de la Société des Arpenteurs de Denis Colin tant sur scène que sur album.

 

Cette gente damoiselle vole de ses propres ailes en trio avec Antonin Rayon (orgue Hammond B3, Clavinet, glockenspiel) et Emmanuel Scarpa (batterie). Le fruit de ses travaux fera l'objet d'un album qui sera présenté en concert à Paris, au Lavoir Moderne Parisien le mercredi 20 avril 2011 à 20h00.

 

Pour le même prix (15 ou 10 €) vous aurez droit en première partie au duo Bruno Chevillon/Jean Marc Foltz.

 

En cliquant sur le lien qui va bien vous arriverez, fines lectrices, subtils lecteurs, sur un concert de ce trio en 2008.

 

Venez donc faire la fête avec eux, flûte alors!

 


 


 

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Jérôme Sabbagh conquiert le Sunset en trio

Publié le par Guillaume Lagrée

Paris. Le Sunset.

Samedi 9 avril 2011. 22h.

 

Jérôme Sabbagh: saxophone ténor, soprano

Ben Monder: guitare électrique

Daniel Humair: batterie

 

Jérôme Sabbagh

 

 

La photographie de Jérôme Sabbagh est l'oeuvre de l'Esthète Juan Carlos HERNANDEZ.

 

Après la sortie de l'album, Jérôme Sabbagh revient sur scène à Paris avec son trio conquérant.

 

Rubrique People: Sylvain Beuf est dans le public pour encourager son collègue saxophoniste.

 

Démarrage subtil. Guitare en sourdine. Les cymbales grincent doucement. Le sax ténor souffle sur du velours. Puis ça grossit comme une bulle de savon légère, brillante mais pas prête d'éclater. Ca part à trois de façon free, disons libre mais coordonnée tout de même. Retour au thème calme du départ. Calme mais avec une tension, une inquiétude sous jacente. Solo de guitare inquiétant encore sous la douceur. Le trio est parti. Ca ondule bizarrement. Ce que j'entends là ne me rappelle rien. C'est dire que ce trio n'est pas commun. Gros son charnu du ténor pour finir.

 

Solo de ténor pour commencer. C'est de l'art abstrait mais de haut vol. Daniel Humair fait d'ailleurs aussi de la peinture abstraite. Et curieusement ça chante! Humair touille la sauce aux balais, la fait prendre, épaissir. La guitare charrie des notes comme des troncs d'arbre sur une rivière. Un solo de Ben Monder comme un rêvé éveillé avec de la réverbération mais sans exagération. Le groupe revient au thème. Décidément, ce soir, ils ont décidé de travailler les tempi lents, medium au maximum.

 

Pour me démentir, un solo de batterie de cuisine de Daniel Humair. Le chef est aux baguettes. Le sax ténor à son tour s'agite énergiquement. Duo sax/batterie dans le pur héritage coltranien. Ce n'est pas ce que je préfère chez John Coltrane. Retour au calme avec le solo de guitare. Le pied de Daniel Humair martèle le tempo sur la grosse caisse mais ses mains, elles, varient, hachent menu. Le sax ténor décolle. Je hoche la tête. C'est bon signe. Où est caché le deuxième guitariste? Ah non, Ben Monder fait ça tout seul. Mazette! Mes cheveux poussent au gré des notes de la guitare. C'est dire l'effet qu'elle fait.  Beau dialogue guitare/batterie. Ca fuse, échange. Tir nourri. 

 

Jérôme Sabbagh passe au saxophone soprano. Un orage électrique tonne au loin. Ballet ultra rapide et précis des baguettes sur les cymbales. C'est à la fois Free, Jazz et Rock'n Roll. Ca dépote, mes aïeux! Un Monsieur à cheveux blancs quitte le premier rang pour s'installer au bar. Il instaure une distance de sécurité entre lui et cet orage musical. Entre guitare et batterie, ça déblaie sérieusement. Ca baisse d'un ton tout en maintenant la tension qui propulse le sax ténor. C'est une sorte de voyage spatial comme le dit justement Sylvain Beuf.

 

Humair commence un solo avec ses mains sur les tambours. Ce n'est plus de la batterie, c'est de la magie. Petits airs sardoniques du sax ténor. Humair reprend ses baguettes en main et ça démarre. Phrases courtes qui partent, s'entrechoquent. Jérôme Sabbagh sait composer et improviser. Avec un tel soutien, il a de quoi être stimulé. 

 

PAUSE

 

Le sax ténor démarre une nouvelle ballade. La batterie scintille sous les baguettes de Daniel Humair. Vibration légère des notes de guitare. Beau solo rêveur, planant à souhait de la guitare. Le trio repart tout en douceur et en fragrances subtiles. Il cultive l'art de la fin surprenante.

 

Solo de batterie. Ca roule sous les baguettes. Les peaux vibrent à l'unisson. Pas de démonstration. De la création. Le trio pousse, tire, explore les champs sonores. Beau dialogue batterie, sax ténor. Coltranien là encore. L'ajout de la guitare change la donne et donc le jeu. Le trio grogne, grogne, soudé. Et puis tout s'apaise sur un roulement de tambour.

 

Beau solo de ténor. Dans la lignée virile de Coleman Hawkins, Sonny Rollins. Le trio est parti en glissades progressives. Ca marche. A côté de moi, un jeune couple. Il a fermé les yeux. Elle aussi, la tête posée sur son épaule. Tableau charmant. Ne croyez pas pour autant prudentes lectrices, méfiants lecteurs qu'il s'agisse d'une ballade sucrée qui colle aux dents et aux doigts. Il y a de l'aigre-doux, du piquant dans cette recette là. Le friselis des cymbales, les notes distillées de la guitare, le saxo de velours. Que du bonheur! Solo de guitare. Les amoureux se sont redressés pour écouter. Ca vibre doucement dans le ventre et charme nos tympans. 

 

Solo de sax ténor. C'est bon comme les glissements progressifs du plaisir. Ca s'anime. La dispute, au sens philosophique, se fait vive. Humair devient Vulcain derrière sa forge alors que la guitare crache le feu sacré du Rock'n Roll. Ca sonne déjà bien dans un club. Mais dans un festival en plein air qu'est ce que ça donnerait! Un bon moment de Rock'n Roll mais bien plus libre, plus puissant que la moyenne du genre. L'orage gronde moins fort alors que le sax ténor revient.

 

0h05. Les amoureux s'en vont. A croire qu'ils prennent le RER. Le métro ferme à 2h du matin dans la nuit du samedi au dimanche. Une ballade en douceur guitare/sax ténor. Une composition qui sonne comme un standard tant elle est simple, apurée, tranchante, prétexte à d'élégantes variations. Solo de guitare tout en douceur, en chaleur. Gracieux. Pas d'applaudissement après le solo. Nous restons concentrés pour le trio. Dieux que c'est bon!

 

Solo de sax ténor vif, ludique entre fluidité et appuis. C'est un vrai discours, pas un simple exercice de style. Humair répond en tapotant les tambours de ses mains. Dialogue guitare/batterie aux baguettes voire même aux manettes de Daniel Humair. Ca vole haut.

 

Humair fait des tours de magie sur ses tambours. Il fait même un bruit de moteur d'hélicoptère. Subitement l'orage se déclenche. Guitare et sax ténor mettent les gaz poussés par le moteur de la batterie. A 0h22, ça réveille, tonnerre de Zeus! L'absence de basse ne se fait pas sentir. Quand Ben Monder et Daniel Humair se défient, pas besoin d'arbitre. Retour au calme pour le sax ténor. Enfin, calme, c'est vite écrit. Ca va repartir aussi sec. Pour un final cosmique. Un dernier claquement de cymbale et c'est fini.

 

Que les programmateurs de festivals de Jazz, de Rock'n Roll, de musiques créatives, improvisées, éclectiques et électriques se le disent, le talent du trio de Jérôme Sabbagh est à louer pour cet été. A louer dis je. A ce niveau là, le talent ne se vend pas.

Le concert de ce trio le vendredi 8 avril au Sunset est disponible en streaming sur France Musique.

Ci dessous, rien que pour vous, adorables lectrices, délicieux lecteurs, " Comptine " extrait de ce concert du samedi 9 avril.

 

 

 

 

 

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Concert de soutien au Japon le vendredi 8 avril 2011 à Paris

Publié le par Guillaume Lagrée

 

Le Japon, grand pays de Jazz, comme en témoigne ce morceau de Miles Davis enregistré lors d'un concert en 1975, a besoin de notre aide.
Nous vous attendons nombreux pour venir soutenir le Japon suite aux événements récents lors d'un concert qui aura lieu le vendredi 8 avril prochain à la maison du Japon (cité universitaire) à partir de 20h00. Trois groupes et de nombreux musiciens seront présents à cette occasion. Les dons récoltés seront reversés à la Croix Rouge japonaise par l'intermédiaire de l'Ambassade du Japon en France.
Pour le Jazz, le pianiste britannique Jim Funnell sera présent.
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Franz Schubert raconte sa vie de Jazzman à Boulogne-Billancourt les 6, 7 et 8 avril

Publié le par Guillaume Lagrée

 

Si vous souhaitez mieux connaitre le destin de Franz Schubert 
à travers sa correspondance et ses lieder,venez écouter

Julia Migenes, chant
Philippe Calvario, comédien, mise en scène 
 

Edouard Ferlet

Edouard Ferlet, piano photographié par le Vivace Juan Carlos HERNANDEZ.

mercredi 6, jeudi 7 et vendredi 8 Avril 2011 
à 20h30 au
THEATRE DE L'OUEST PARISIEN
1 place Bernard Palissy 
92100 Boulogne-Billancourt
resa: (0)1 46 03 60 44

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Le Jazz en France: inventaire avant liquidation? Entretien avec Laurent Coq

Publié le par Guillaume Lagrée

 

 

« Pourquoi le coq est le symbole de la France ?

Parce que c’est le seul animal qui chante avec les pieds dans la m… ! » 

Coluche.

 

Laurent Coq

La photographie de Laurent Coq est l'oeuvre de l'Indépendant Juan Carlos HERNANDEZ

 

 

The World Belongs To Those Who Dare

 (Paroles et musique de Laurent Coq)


The world belongs to you and me

if only we know how to see

the beauty that lies in a tree

a smile, a kiss, a symphony

 

The world one day will dance with you

cause you won't fake the things you do

but rather try to remain true

to the kid that once was in you

 

It's easier to follow the crowd 

Than to walk in the narrow path 

That leads to who you really are

 

The world belongs to those who dare

to blow a new song in the air

so we can sing and be aware

that music is the thing to share


Le Jazz ce n’est pas seulement un parfum ou une voiture. C’est d’abord une musique produite par des musiciens vivants héritiers d’un siècle de création et de métissage.

 

C’est pour rappeler ces principes de base que le pianiste, compositeur, professeur Laurent Coq a pris sa plume pour s’attaquer à un système oligarchique qui phagocyte la créativité tout en prétendant l’entretenir.

 

Dans le Jazz, en France, se retrouve un mal typiquement français, le cumul des mandats. C’est ainsi que ceux qui programment la musique, sont aussi ceux qui la produisent, la diffusent et distribuent les prix. 

 

Voici le fruit de mon entretien avec Laurent Coq sur ce sujet le dimanche 3 avril 2011 à Paris.

 

Question : pourquoi t’attaquer à TSF Jazz, la radio de tous les Jaaazzz ?

Réponse : Parce que le même homme, M. Sébastien Vidal, dirige la programmation de cette radio, celle du Duc des Lombards, un des grands clubs parisiens, produit des albums, dirige une soirée annuelle à l’Olympia où les musiciens sont invités à jouer sans être payés. Finalement, refuser de passer par ce système, c’est s’exposer à une censure économique : ne pas être produit, diffusé.

Dans la littérature, c’est dénoncé tous les ans lors de la remise des prix littéraires trustés par la famille « Galligrasseuil ». Dans le Jazz, tout le monde se tait, par peur.

 

Question : d’où vient ce système ?

Réponse : Le Jazz, c’est bon pour l’image. C’est classieux comme disait Serge Gainsbourg. Cette musique souffre d’une dérive mercantiliste. TF1 dit clairement les choses. Son PDG, Nonce Paolini, est un fou de Jazz ( une collection de plusieurs de dizaines de milliers d’albums en vinyle et en CD) mais il n’en passe pas sur sa chaîne. TSF Jazz prétend diffuser tous les Jazz alors que c’est faux. Il suffit de regarder sa grille de programmes pour s’en apercevoir. 

 

Question : quelle utilité de prendre ainsi la parole ?

Réponse : Les musiciens de Jazz autrefois étaient des durs, des indomptables. Mingus, Miles Davis, Monk. Aujourd’hui, ils sont soumis, ils ont peur. Les musiciens sont trop individualistes. Chacun essaie d’exister dans son coin. A Hollywood, les scénaristes ont fait grève et les producteurs ont dû céder parce qu’ils ne pouvaient pas s’en passer. Le Jazz c’est pareil. Sans musiciens, pas de spectacle, pas de business.

 

Q : qu’est ce qui ne passe pas sur TSF Jazz ?

R : nous sommes dans une période bénie pour le Jazz, pour la production. Il y a une nouvelle génération de musiciens formidables, qui pousse et qui ne passe jamais sur TSF Jazz. Rien que pour la guitare : David Doruzka, Nelson Veras. Pourtant, ce sont eux qui laisseront des traces dans l’histoire de cette musique.

 

Q : comment y remédier ?

R : Il y a un phénomène corporatiste autour du Jazz. Le musicien est le dernier à avoir la voix au chapitre. J’avais un projet d’émission pour TSF afin de passer de la musique qui, justement, n’y passe pas, afin que cette radio soit vraiment, comme elle le prétend, la radio de tous les Jazz. Je n’ai pas eu de réponse, pas même négative.

 

Q : pourquoi est-ce toi qui t’exprime ?

R : tous les musiciens le disent en privé. Mais ils n’osent pas l’écrire. Cela arrive dans un climat particulier (proximité des élections en France, printemps arabe, catastrophe nucléaire au Japon). L’air du temps est au changement, à la remise en cause. Le blog est un cahier de doléances. Ensuite on verra ce que cela donnera. Peut-être que les virages que j’ai opérés ces dernières années avec la création de mon propre label, et mes choix artistiques avec des musiciens intègres, me protègent de possibles pressions ou représailles.

 

Q : quels sont les effets de cette censure économique ?

R : Le Jazz coûte si cher aujourd’hui (production, diffusion, attachés de presse, festivals à démarcher…) que les jeunes musiciens sont désormais issus de milieux très aisés pour une grande majorité d’entre eux. Cela n’enlève évidemment rien à leur talent. Qu’on écoute le jeune Antonin Tri Hoang qui vient d’enregistrer son premier disque avec Benoit Delbecq pour Bee Jazz pour s’en convaincre. Mais il faut bien comprendre que ces systèmes verrouillés produisent de la ségrégation sociale. Il y des tas de jeunes musiciens magnifiques qui viennent de milieux modestes – nous en voyons pas mal à l’Edim, l’école où j’enseigne – dont je me demande comment ils vont faire pour percer ce plafond de verre. Quand je suis arrivé à Paris en 1988, au CIM il y avait des musiciens qui venaient de partout. Les gars de Sixun n’étaient pas issus des beaux quartiers. Aujourd’hui, c’est une perte de sève. Il ne faut pas oublier que cette musique est aussi née des bas fonds. Louis Armstrong a appris à jouer du cornet en maison de correction ! Maintenant, c’est devenu un produit d’appel, confisqué par des marques.

 

Q : comment se manifeste cette position dominante du duopole Duc des Lombards/TSF ?

R : d’abord au Duc, tous les concerts sont filmés. En léger différé ce qui est désagréable pour le spectateur. Et puis, à ma connaissance, rien n’est prévu pour les droits d’auteur des artistes sur ces films. Pourtant les lois sur la propriété intellectuelle prévoient bien une autorisation de l’artiste pour tout enregistrement et diffusion de son travail ainsi qu’une rémunération dudit travail.

 

 

Article L111-1du Code de la propriété intellectuelle :

Modifié par Loi n°2006-961 du 1 août 2006 - art. 31 JORF 3 août 2006

L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. 

Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du présent code. 

L'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions prévues par le présent code. Sous les mêmes réserves, il n'est pas non plus dérogé à la jouissance de ce même droit lorsque l'auteur de l'oeuvre de l'esprit est un agent de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public à caractère administratif, d'une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France. 

Les dispositions des articles L. 121-7-1 et L. 131-3-1 à L. 131-3-3 ne s'appliquent pas aux agents auteurs d'oeuvres dont la divulgation n'est soumise, en vertu de leur statut ou des règles qui régissent leurs fonctions, à aucun contrôle préalable de l'autorité hiérarchique. 

 

TSF diffuse des concerts live tous les soirs. Soit, c’est une excellente initiative. Mais quid de la rémunération des musiciens là aussi ? Ils sont venus enregistrer mon Blowing trio au New Morning il y a quelques années. Je n’ai pas le souvenir que nous ayons eu une quelconque rétribution. Ensuite TSF fonctionne avec la sacro-sainte playlist. Qui me dit que ce n’est un moyen de clientélisme, et que le morceau qui a été sélectionné n’a pas fait l’objet d’une tractation avec achat de publicité par le producteur sur l’antenne ? Pourquoi pas, après tout, me direz-vous ? TSF Jazz est une entreprise privée qui doit être rentable. Elle fait ce qu’elle veut de son argent mais qu’elle ne nous raconte pas d’histoire. Ce n’est pas la radio de tous les Jazz. 

 

Enfin le même homme, Sébastien Vidal, dirige TSF Jazz, le Duc des Lombards, le festival de Samois sur Seine, produit des albums. Bref il exerce une position dominante dans cette profession. En abuse t-il ? A vous de juger.

 

Q : quel est ton message final ?

R : il ne faut jamais oublier que, dans le Jazz, l’individu est au service du collectif. C’est ce qui fait la force et la richesse du travail de Steve Coleman depuis plus de trente ans par exemple. Il est hors de question de laisser cette richesse collective confisquée par quelques individus fussent-ils d’un abord souriant et sympathique comme Sébastien Vidal.

 

Je n’avais pas d’agenda, de plan préétabli quand j’ai lancé ces emails. Aujourd’hui, il y a un débat de très bonne tenue, très vivant, avec de nombreux acteurs de ce petit monde. C’est déjà magnifique ! Il y a moins d’une semaine, nous étions encore tous silencieux. J’entends dire qu’il faut vite en faire quelque chose de concret, ne pas laisser retomber, faire des propositions, une table ronde, une pétition… Certes, mais laissons dans un premier temps la parole se libérer. C’est une chose trop rare pour ne pas s’en réjouir et prendre le temps de la contempler et de l’entendre. On dirait parfois que tout ce déballage dérange. Ça fait désordre. 

 

Bien entendu, très bientôt viendra le temps d’en faire quelque chose qui laissera une trace plus pérenne.  Des pistes ont déjà été lancées. La Mairie de Paris réfléchie actuellement à casser l’image de Ville morte que la capitale a développé à l’étranger. C’est peut-être le moment d’aller frapper à leur porte et de proposer qu’ils nous octroient une salle qui serait gérée par une association de musiciens qui souscrivent à l’idée que ce lieu manque à Paris, sur le modèle de l’AMR à Genève.  Un lieu qui serait ouvert aux jeunes musiciens, à des jams, avec des prix abordables et qui verraient revenir vers nous toute une jeunesse qui adore notre musique mais ne peut pas se l’offrir rue des Lombards et qui, comme un grand nombre d’entre nous, est otage d’un système fermé.

 

Ces jours-ci,  je me disais aussi que ce serait extraordinaire d’avoir un texte, un manifeste, qui dise des choses aussi simples que « le Jazz appartient avant tout aux musiciens, et que sans leur dévouement, leur abnégation, et leurs années d’effort, tous ceux qui vivent de lui seraient au chômage ». Ou bien « nous déclarons que, par notre engagement total à notre musique, quel que soit notre génération, style, chapelle, influence, origine sociale, nous avons fait le choix de la liberté et de l’intégrité sur celui de la cupidité », avec en bas de page des centaines de signatures de musiciens de tous âges et nationalités, des connus, des moins connus… oui, décidemment, ça aurait de la gueule. Car encore une fois, plus nous serons nombreux à le dire, plus ces vérités auront des chances d’être entendues.

 

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Dan Tepfer dialogue avec Lee Konitz à Paris

Publié le par Guillaume Lagrée

 

 

Paris. Vendredi 1er avril 2011. 20h.

 

Lee Konitz

La photographie de Lee Konitz est l'oeuvre du Vif Juan Carlos HERNANDEZ.

 

Dan Tepfer : piano

Lee Konitz : saxophone alto

 

Ils jouent sans micro. Lee se tâte au sax. Puis il commence seul la mélodie de « Just Friends ». C’est par ce morceau que commence l’album en duo Martial Solal/Lee Konitz enregistré en concert à Hambourg le 11 novembre 1983. Dan Tepfer avait un an. Dan expose à son tour la mélodie avec de subtils décalages. Puis ils jouent  ensemble. Certes Lee Konitz vieillit mais si j’arrive à 84 ans comme lui aujourd’hui, j’espère avoir autant d’énergie. Il transmet l’art de la ballade, de la liberté dans le cadre d’un classicisme qu’il a inventé. En jouant, l’énergie lui revient. Dan le stimule et Lee s’envole encore. C’est rare d’entendre en 2011 un jeune musicien qui sait jouer les standards du Jazz en n’ayant pas l’air de réciter une leçon. Merci à Dan Tepfer d’être là avec Lee Konitz. Belle acoustique sans truchement électrique. C’est bon pour les oreilles.

 

Dan introduit seul une ballade. Les notes coulent de ses doigts comme des gouttes d’eau claire. Ca lave l’âme tout en douceur mais la pulsation est bien là. Lee joue maintenant lui aussi. Tranquille, aigre-doux. Je ne reconnais pas ce standard. Le plafond de la salle est surtout constitué d’une baie vitrée. Le soleil descend lentement alors que la musique, elle, s’élève. Dan est merveilleusement à l’écoute. Superbe final.

 

Lee commence seul un autre morceau pour dormir, d’après lui. « It’s ok boys if you want to sleep on this tune if you like too”. Dan fait vibrer lentement une corde du piano tenant la note avec une pédale. Puis il joue un autre standard que je ne reconnais pas. Le piano martèle alors que le saxo serpente. Le piano, un marteau avec maître, qui décale les sons. En solo, Lee s’arrête pour reprendre son souffle, reprend la musique où il l’avait laissée et l’emmène plus loin encore. Au tour de Dan de déployer ses ailes. La musique tournoie, enveloppe le saxophone.

 

Ils enchaînent sur un autre standard dont je reconnais l’air pas le titre. « Thingin » de Lee Konitz je crois. Basé sur je ne sais plus quel standard. Surpris, le public n’a pas pris le temps d’applaudir. « Thingin » c’est le titre d’un album live de Lee Konitz. Après ce bref morceau, le public peut se lâcher.

 

Intro au piano. Le son du piano évoque maintenant le château hanté dans la brume. Lee s’est assis pour ajouter des volutes de fumée de son saxophone. Cela sonne comme un rêve étrange et familier. Il y a une grande part d’improvisation dans cette musique. Banalité certes mais qui doit être rappelée car ce niveau d’entente et de possibilité des imaginations conjuguées est rare. Il n’est pas nécessaire de connaître les codes pour écouter cette musique. Il suffit de se laisser porter. Ah, la touche du pianiste classique dans le fortissimo ! Lee loupe une note, s’agace et le morceau s’arrête.

 

« Star by starlight » une variation sur « Stella by starlight » je suppose. Lee commence seul. C’est bien l’air du standard mais subtilement manipulé, décalé. A son âge, Lee Konitz a toujours la volonté de se remettre en question même s’il reste dans son domaine, les standards. D’où ce choix d’un pianiste qui pourrait être son petit-fils, le stimule sans le contester, conscient de son privilège sans rien perdre de sa personnalité. Beau solo de Dan que Lee ponctue d’un « Oh, oh, oh » admiratif. Lee s’y remet et c’est la fin du morceau.

 

Lee commence seul. Puis vient le son très grave du piano qui tourne en boucle. Lee se promène sur la mélodie. Petite citation de Bach il me semble. Quelle faculté d’écoute et de soutien de Dan Tepfer ! C’était « Carrie’s Trance » de Lee Konitz. Ils avaient bien commencé avec « Thingin ». La nouvelle m’est confirmée.

 

« Now we are not gonna play of composition of mine. We are not gonna play a composition of Dan. We are gonna play a composition of somebody else “ dit Lee Konitz. Un standard. Une ballade. Attention, cela ne signifie pas que l’écoute soit de tout repos. Il faut suivre, se laisser séduire par cette beauté. La qualité d’écoute du public est à la hauteur de celle des musiciens. Comme dans un concert de classique, on n’applaudit qu’à la fin du morceau. Solo de piano inspiré. Duo final somptueux. « Music to commit suicide to » dit Lee qui mime le pendu ! Se moquer de la mort à cet âge, c’est une forme de sagesse.

 

Lee commence seul. Le piano vient creuser dans le grave. Le sax alto est lui léger, aérien, sinueux. L’air et la terre se mêlent dans la musique. C’était « Subconscious Lee » la composition la plus célèbre de Lee Konitz

 

Dan commence à jouer dans les cordes et sur le clavier. Je pense que c’est « Body and Soul ». Etrange intro mais c’est bien le thème. Lee chante « eeeh » (« iii » pour les francophones) . Lee commence à jouer le thème alors que Dan fait de la harpe dans les cordes de l’instrument. Lee chante « Oo, oh ». Un vrai gamin. C’est la version la plus ludique, la plus étonnante que j’ai jamais entendu de Body and Soul parmi une centaine.

 

Lee est prêt à jouer. Il démarre. Dan le rejoint. Ca chante. Un nouveau morceau ludique et beau. « Out of nowhere ». Un standard. Puis Lee discute avec un spectateur à propos d’une avenue de New York.

 

Dan démarre. Lee se repose et écoute comme nous. Une ballade composée par Dan. Une promenade dans une avenue de New York par un beau jour de printemps. Le piano sonne plus grand qu’il n’est (c’est un quart de queue). Lee applaudit avec nous.

 

« A last piece before a glass of wine » annonce Lee. Il commence seul. Superbe solo mouvant, émouvant. La musique oscille doucement. C’est frais et ça tient chaud en même temps. Au tour de Dan d’écouter, de déguster. Il se met à jouer. Personne n’applaudit. Tout le monde est concentré. Dan chantonne, monte et descend le torse et les bras. Enfin, bref, il s’exprime joliment. Lee le rejoint. Duo enflammé, passionné. Une dernière trille de piano. Un dernier « Oh, oh » de Lee et c’est fini.

 

Lee convainc Dan de jouer seul un extrait des « Variations Goldenberg ». Vous avez bien sûr reconnu les « Variations Goldberg » de Jean Sébastien Bach, surnommées « L’Ancien Testament de la musique ». Dan prépare un album d’interprétation et d’improvisation sur ces « Variations ». Son interprétation est un pur délice qui rendrait fou furieux les baroqueux. Quoique le risque soit minime vu que les puristes n’écouteront jamais Bach joué sur un piano par un Jazzman. Horresco referens !

 

Lee revient sur scène. Après la « joky version » de Body and Soul, ils jouent une « non joky version » de « Darn that dream ». Ils la jouent subtilement comme cela doit être joué.

 

Pour conclure, je vous offre en cadeau lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs, Dan Tepfer et Lee Konitz jouant avec La Marseillaise lors d'un précédent concert en duo à Paris, au Sunside. Leur entente s'est bien affinée depuis.

 

 

 

 

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Sélection de concerts de Jazz pour avril 2011 à Paris

Publié le par Guillaume Lagrée

 

 

Lectrices raffinées, lecteurs distingués, c'est avec une mauvaise foi digne de Schopenhauer et une partialité digne de Caligula que je vous recommande quelques concerts de Jazz en avril 2011 à Paris.

 

Jérôme Sabbagh

 

La photographie de Jérôme Sabbagh est l'oeuvre du Fastueux  Juan Carlos HERNANDEZ.

 

Au Sunside:

lundi 4 avril à 21h le percussionniste argentin Minino Garay et sa Cordoba Reunion. Muy caliente!

Mercredi 20 avril à 21h le pianiste guadeloupéen Alain Jean Marie jouera ses  " Biguine Reflections" dans le cadre de la soirée Jazz Outre Mer de la rue des Lombards, 75001 Paris. Un billet à 25€ vous donnera l'entrée dans les 4 clubs de la rue des Lombards (Sunset-Sunside-Baiser Salé-Duc des Lombards) ce soir là. Chofé biguine la!

Jeudi 21 avril à 21h le quartet du tromboniste et conquiste Sébastien Llado vient fêter au Sunside son album Live au Sunside. Logique, non?

 

Au Sunset:

vendredi 8 et samedi 9 avril à 22h le trio Jérôme Sabbagh/Ben Monder/Daniel Humair dont l'album est chroniqué avec éloge dans ce blog.

lundi 11 avril à 21h le trio Mark Helias/Tony Malaby/ Tom Raney. Elégantes lectrices, soigné lecteurs, attention à vos brushings et à vos franges! Ca décoiffe!

Lundi 18 et mardi 19 avril à 21h le trio de Lenny White le batteur du groupe " Return to forever " de Chick Corea, un des batteurs de " Bitches Brew " de Miles Davis. Bref un des Dieux de la fusion Jazz Rock.

 Vendredi 29 et Samedi 30 avril à 21h00  carte blanche à Manu Codjia/Géraldine Laurent/ Christophe Marguet.

 

Au Duc des Lombards:

Mercredi 13 et jeudi 14 avril à 20h et 22h le trio du guitariste belge Philippe Catherine qui n'a rien à voir avec le chanteur vendéen.

Lundi 18 et mardi 19 avril à 20h et 22h le quartette du tromboniste et souffleur de conques américain Steve Turre ancien membre du Dizzy Gillespie United Nations Orchestra.

Lundi 25 et mardi 26 avril à 20h et 22h le contrebassiste breton Henri Texier présentera son Nord-Sud Quintet.

Samedi 30 avril à 20h et 22h le contrebassiste Jean-Philipe Viret vous permettra de voter Pour son trio.

 

Au Baiser Salé:

mardi 5 avril à 21h30 le quartette du dernier saxophoniste ténor de Miles Davis, Rick Margitza.

 

Au New Morning:

lundi 11 avril à 21h le vibraphoniste Roy Ayers nous servira son fameux cocktail de Jazz et de Soul.

Jeudi 14 avril à 21h le pianiste cubain Omar Sosa viendra vous enchanter avec sa Clave intergalactique.

mercredi 27 avril à 21h la chanteuse canadienne Patricia Barber viendra nous envoûter.

vendredi 29 avril à 21h le saxophoniste ténor Pharoah Sanders, un des deux fils spirituels de John Coltrane sera sur scène dans  toute sa majesté.

 

Salle Pleyel:

Dimanche 17 avril à 20h, Dave Holland, contrebassiste anglais de renommée mondiale depuis son passage chez Miles Davis en 1969 donnera sa leçon de sagesse musicale.

 

Atelier Charonne:

Mercredi 27 avril à 21h le trio du guitariste Sean Gourley, digne fils de son père Jimmy, donnera un concert Coolissimo.

 

 

Grande Halle de la Villette:

Jeudi 28 avril à 20h Rue tzigane avec le violoniste Didier Lockwood et le guitariste Bireli Lagrène.

 

Atelier du Plateau:

Jeudi 28 avril à 20h le quartette du clarinettiste cosmi comique Sylvain Kassap. Décoince les zygomatiques et ouvre l'esprit.

Cité de la Musique:

Mardi 12 avril à 20h, Dave Douglas Brass Ectasy rend hommage à Lester Bowie. L'hommage sera t-il aussi chaud, bouillonnant, passionné, fusionnel que l'original, la Brass Fantasy de Lester Bowie? Aucun rapport avec le dandy de la Pop anglaise.

Mercredi 20 avril à 20h, Diction & Contra Diction avec Cecil Taylor (piano) et Amiri Baraka (poésie). Deux des pères fondateurs du Free Jazz, paroles et musique, pour la première fois ensemble sur scène à Paris. Concert hautement recommandé pour les slammeurs, rappeurs, rimeurs désireux de se plonger aux sources vives de la création.

Le Sentier des Halles:

Mardi 5, 12 et 19 avril à 21h45, André Stocchetti, Le Fluturiste dont je cesserai de chanter les louanges le jour où il perdra son talent unique cosmi comique. Plaise aux Dieux que cela n'arrive jamais!

Auditorium Saint Germain des Prés:

Lundi 11 avril à 19h30 leçon de Jazz d'Antoine Hervé: " Les deux grands quintettes de Miles Davis " avec Eric Le Lann (trompette). Spectacle hautement recommandé pour l'éducation des masses laborieuses!

 

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L'Enchanteuse Claudia Solal charme le Triton des Lilas

Publié le par Guillaume Lagrée

Claudia Solal Spoonbox Quartet.

Les Lilas. Le Triton.

Jeudi 31 mars 2011. 21h.

 

 

Joe Quitzke

La photographie de Joe Quitzke est l'oeuvre du Précieux Juan Carlos HERNANDEZ.

 

Claudia Solal : chant

Benjamin Moussay : piano, claviers

Jean Charles Richard : saxophones soprano, baryton

Joe Quitzke : batterie

 

Rubrique people : Claudia Solal a changé de coupe et de couleur de cheveux. Opération réussie.

 

Jean Charles Richard commence au baryton. Le clavier gronde. Le baryton fait des ondes agitées. Ca démarre. « Suffer me to kiss thy mouth ». Demandé aussi élégamment et impérieusement, il est difficile de résister. Passage au sax soprano plus aigu. Joe Quitzke bâtit, derrière, le mur du son. Ca enchaîne sur un rythme plus heurté , plein de petits bruitages cosmi comiques tout en restant dans la même chanson. Oh le son planant du soprano ! C’était un extrait de la « Salomé » d’Oscar Wilde.

 

« A thought went out of my mind today » (Emily Dickinson). Claudia Solal a lu, chanté pendant des années sur scène, en duo avec Benjamin Moussay, des poèmes d’Emily Dickinson. De cette union musicale naquit l'album " Porridge Days " toujours hautement recommandable. Elle chante ce poème ci sans le lire. Benjamin mêle clavier électrique et acoustique en introduction de cette poignante ballade. Il frotte sur nos cordes sensibles. Pourquoi le système nous interdit-il d’écouter cette merveille à la radio, à la télévision, à des heures et dans des émissions de grande écoute ? Peut-être justement parce que c’est trop beau pour l’idée que se font les diffuseurs des auditeurs.Nonce Paolini, PDG de TF1, est un des plus grands collectionneurs de disques de Jazz en France. De là à ce qu’il passe du Jazz sur sa chaîne… Après cette chanson, un soupir passe dans le public avant qu’il n’applaudisse.

 

« Blocks » (Jean Charles Richard). Les bruits de la ville. New York CityLes voitures. Une musique speedée, stressée comme la ville meme. “Elle était debout leur ville “ comme l’écrit Céline dans “ Le voyage au bout de la nuit “. Le sax baryton grogne. La batterie hache. Le piano virevolte. Et la voix de Claudia court au rythme de la ville sans herbe, sans oiseau. C’est un cocktail très énergétique que cette chanson là.

 

Retour au piano. Une sorte de ballade . Joe est passé aux balais. Superbe chant du sax baryton auquel répond le chant plus haut de Claudia. Du nanan pour les portugaises aurait écrit Boris Vian. « All right ! » s’exclame une spectatrice avant les applaudissements. C’était « Soundscape » de Benjamin Moussay.

 

DJ Benji lance des bruits d’oiseau avec l’électronique. Bruitages divers du piano, du soprano et de la batterie. Nous sommes dans l’humour absurde musical. Le public est perturbé. Il ne sait plus quand applaudir. Claudia nous encourage.

 

DJ Benji sort maintenant des bruits d’hélicoptère. Il y a plusieurs adolescents dans la salle. Ils sont accrochés. Ils écoutent. Le sax soprano répond aux bruitages de l’électro alors que la voix de Claudia passe de la douceur à la brisure. Belles vibrations des cymbales. Des vagues contrôlées. Ca monte à quatre en pyramide. Claudia est la pointe, bien sûr. Superbe solo de soprano, aérien, touchant, du souffle au chant. Seul sur scène face au public, Jean Charles Richard nous emmène loin, loin. L’album est toujours là, le groupe aussi. La musique, elle, évolue. C’est le privilège des improvisateurs. Benjamin ajoute le clavier. Le groupe reprend et nous applaudissons. Ca balance. Les demoiselles devant moi hochent leurs têtes en cadence. C’était « Room Service » le titre éponyme de l’album.

 

« Double rabbit ». C’est l’histoire d’un hôtel étrange. DJ Benji lance des bruits bizarres. Le téléphone ne fonctionne plus. DJ Benji sort une grosse ligne de basse sourde, menaçante. Joe distille les sons en vrai barman (« Le batteur est un barman de sons » Jean Cocteau). Benjamin revient au piano pour un air joyeux et entraînant interrompu par le fracas de la batterie et le retour de cette terrible ligne de basse. Jean Charles Richard fait gémir le baryton. Le batteur martèle avec subtilité, art délicat. Les demoiselles devant moi sont dans le truc, prêtes à danser. Pour le final, Jean Charles Richard est passé au soprano. Cela devient dansant et grinçant à la fois. Cet homme est bien le digne successeur de Dave Liebman. Ne cherchez pas plus loin. C’est lui. « It might rain or something really grand might happen » chante Claudia. Quelque chose de grand se passé en effet. La musique de ce quatuor ultra moderne. Le texte se dérègle alors que les bruitages du départ reviennent.

 

PAUSE

 

Je n’ai pas assez dormi la veille et je dois aller à l’école le lendemain. Le concert s’arrête donc là pour moi. Je passe saluer la chanteuse et ses hommes en compagnie de Dan Tepfer et de Lee Konitz que j’irai écouter en concert le vendredi 1er avril. Et ce n’est pas une blague !

 

En cadeau, rien que pour vous, aimables lectrices, sympathiques lecteurs, Claudia Solal et ses hommes chantent la Salomé d'Oscar Wilde lors d'un concert au Studio de l'Ermitage à Paris le 5 mai 2010. La musique a évolué depuis, la coiffure de Claudia aussi.

 

 

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