Eric Le Lann & Paul Lay " Thanks a Million "
Eric Le Lann & Paul Lay
" Thanks a Million "
Gazebo Production. 2018
Eric Le Lann: trompette
Paul Lay: piano
Lectrices Swing, lecteurs Hot, ce blog vous a maintes fois chanté les mérites de Louis Armstrong (1900-1971), le seul et unique Roi du Jazz (quand Louis apprit que Benny Goodman se faisait appeler King of Swing, il voulut le tuer) et d'Eric Le Lann (1957), le plus émouvant trompettiste de Jazz français depuis 40 ans.
Eric est le fils d'Hervé Le Lann, dentiste de profession, trompettiste de Jazz New Orleans par passion qui lui communiqua son amour de Louis Armstrong dès le départ.
" A la trompette, même dans les trucs les plus modernes, vous ne pouvez rien faire qui ne vienne pas de Louis " (Miles Davis qui se fit chanteur dans un chœur avec Ornette Coleman pour l'album " Louis Armstrong and his friends " en 1970).
En hommage à son père et à son Maître, Eric Le Lann a donc décidé de travailler le répertoire de Louis Armstrong (interprète inoubliable mais fort peu compositeur comme Chet Baker à qui Eric Le Lann a déjà rendu hommage) .
Louis Armstrong a enregistré le premier duo piano & trompette de l'histoire avec Earl " Fatha " Hines ( Fatha parce qu'il est le Père des pianistes de Jazz). " Weather Bird " (1928), un chef d'œuvre évidemment.
Nonante années après, c'est en duo avec le pianiste Paul Lay qu'Eric Le Lann rend hommage à Louis Armstrong. En concert, cela sonne du feu de Zeus. En studio, le charme fonctionne aussi comme le prouve cet album.
Eric Le Lann a déjà enregistré deux duos avec des pianistes. En studio avec Michel Graillier " Trois heures du matin ". En concert à Jazz à Vannes avec Martial Solal " Portrait in Black and White " (1999). Deux décennies plus tard, Paul Lay ( ne pas confondre avec le pianiste américain Paul Bley qui donna son nom à Carla ) succède à deux chevaliers des touches.
Le Blue est joué à son essence. Cf la version de Saint James Infirmary (8) en extrait audio au dessus de cet album. Bien entendu, ces musiciens sont assez créatifs et pas assez fous pour copier Louis Armstrong & Earl Hines. Copie t-on les cathédrales gothiques d'Ile de France ou les pyramides d'Egypte? Si mais cela ne donne que des copies, pas des créations.
Il suffit d'écouter l'attaque au piano de " Dinah " (1) pour comprendre l'esprit de cette musique. Il s'agit de rendre hommage à Louis Armstrong et d'en tirer une source d'inspiration. Son répertoire était d'une telle modernité pour son époque qu'il passe l'épreuve du temps.
" J'essaie de mettre toute ma vie dans chaque note que je joue " (Louis Armstrong). Le brillant de la sonorité de Pops ( son surnom pour le peuple noir américain, Satchmo pour le reste du monde) est intouchable mais Eric Le Lann s'emploie à jouer cette musique avec l'énergie nécessaire. Cf " Jubilee " (3) et " Tight like this " (4). Louis Armstrong, c'est aussi un art de jouer lazy, en retard volontaire par rapport au tempo. Surtout sur les ballades. " Sleepy time down South " n'est pas joué mais il y a " Azalea " (6) superbe thème de Duke Ellington qui figure sur un album culte qui réunit ces deux Géants du Jazz, " The Great Summit " (1961), tout simplement.
Comme Louis Armstrong est la source d'inspiration de ce duo, chacun des musiciens lui dédie un thème.
Pour Paul Lay, c'est un " Farewell to Louis " (10) qui, en toute logique, clôt l'album.
Pour Eric Le Lann, Breton et Jazzman, c'est un " Louison " (7) que je me plais à imaginer comme un hommage simultané à Louis Armstrong et à Louison Bobet, triple vainqueur du Tour de France (1953-1954-1955) et champion du monde de cyclisme sur route (1954).
A votre tour, lectrices Swing, lecteurs Hot, dites " Thanks a Million " (5) à Eric Le Lann & Paul Lay pour cet hommage élégant et émouvant à Louis Armstrong.