Fred Hersch Trio au Duc des Lombards

Publié le par Guillaume Lagrée

Fred Hersch Trio

Paris. Le Duc des Lombards. Mercredi 8 juillet 2009. 20h.

Fred Hersch : piano
John Hebert : contrebasse
Nasheet Waits : batterie

La photographie de Nasheet Waits est l'oeuvre de l'Intouchable Juan Carlos Hernandez.

Du Gershwin pour commencer nous annonce Fred Hersch. Son jeu est très mélodieux. Il a accompagné Art Farmer, Stan Getz, Joe Henderson et ça s’entend. C’est « The man I love ». Tout est fin, précis dans ce trio. Le cliquetis des baguettes de Nasheet Waits, c’est de la dentelle de Calais. Une petite danse dans l’aigu, en vagues, amène la fin du morceau. C’est de l’orfèvrerie.

« Black dog pays a visit », une composition de Fred Hersch inspirée par la dépression surnommée « Black Dog » par Sir Winston Churchill. Un solo de maillets pour commencer. Le climat est sombre. La contrebasse y ajoute de la profondeur. Le piano sonne plus léger mais brumeux et inquiétant lui aussi. Le passage du chien noir est bien visible. L’ambiance est triste, lancinante, dépressive. Solo de maillets. Les tambours chantent la complainte du dépressif, son oppression ponctuée de coups de cymbales. C’est précis et émouvant. La tension est palpable. Personne n’applaudit le solo. Nous écoutons attentivement.

Ils enchaînent sur « Lonely Woman » d’Ornette Coleman, autre morceau dépressif. Puis sur un thème de Bill Evans, musicien dépressif par excellence, « Nardis ». Ils quittent le thème, dérivant, tournoyant puis y reviennent mais de loin. Beau solo de contrebasse. Les cordes craquent mais ne cèdent pas. Elles vibrent, grondent. Le piano repart sur « Lonely Woman ».

« Change partners » (Irving Berlin). Un morceau frais, joyeux pour sortir de la phase dépressive. C’est joyeux mais avec un voile d’inquiétude. Ce n’est pas jubilatoire comme Martial Solal ou Ahmad Jamal. Du moins pour le pianiste. Le batteur, lui, rayonne. La contrebasse, elle, sautille.

« Saraband » (Fred Hersh). Une composition d’il y a 20 ans environ. C’est une ballade. Le batteur se met aux balais et fait ronronner ses tambours.

« Fore runner » (Ornette Coleman). Ca sautille, ça gigote. C’est du Ornette. Nasheet Waits est un batteur prodigieux : virevoltant, surprenant, impeccable.

« Some other time ». Une nouvelle ballade. Les balais font des papouilles aux tambours. La contrebasse sonne majestueusement. Le piano valse par là dessus. Ca glisse, vole, plane sans jamais se poser, ni s’épuiser.

Un solo de piano pour introduire. C’est du Monk mais le titre m’échappe. C’est heurté comme du Monk mais avec le liant de Fred Hersh. Le groupe a repris avec une marche décalée aux cymbales.

Ce soir j’ai découvert un pianiste, artiste modeste, qui gagnerait à se lâcher plus mais il lui faudrait vaincre pour cela sa timidité naturelle. Le contrebassiste est bon. Le batteur, Nasheet Waits est jeune, talentueux, précis, fin, élégant. Il a encore beaucoup à nous dire. A suivre de près.

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F
Salut Guillaume ! Enfin, je peux lire tes commentaires sur ces deux concerts que l'on est allé voir ensemble. Une remarque : je ne pense pas que Hersch vaincra sa timidité naturelle. C'est comme Bill Evans, ces musiciens sont dans un univers bien à eux et ce n'est pas à nous qui allons les en déloger, ce serait non seulement prétentieux, mais aussi chose impossible... Encore merci pour ces quelques jours à Paris !
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G
<br /> Au plaisir citoyen Fred<br /> <br /> <br />