Ohad Talmor en trio intergénérationnel

Publié le par Guillaume Lagrée

 

Ohad Talmor Trio. Paris. Le Sunside . Mercredi 30 septembre 2009.21h.

Ohad Talmor : saxophone ténor
Steve Swallow : guitare basse électrique
Adam Nussbaum : batterie

La photographie d'Ohad Talmor est l'oeuvre du Surpuissant Juan Carlos Hernandez.

Steve Swallow tapote et étouffe ses cordes. Caresses des balais. Sax ténor au son chaud, viril. Jeu économe, qui respire. Ca change des débordements post coltraniens. C’est élégant, pointilliste comme un paysage de Sisley. La salle est à moitié vide. Malheur aux absents. Solo de Steve Swallow. Ses cordes tintent comme une guitare avec la profondeur de la basse par en dessous. Musique enjoleuse, charmeuse mais pas mielleuse. Elle tient chaud comme une écharpe légère autour du cou. Pas étonnant qu’Ohad joue avec Lee Konitz. Comme lui, il fait chanter son saxophone comme un oiseau. Peu d’appuis, peu d’attaque, un fluide léger et apaisant vole dans l’air.

Enchaînement direct sur un duo batterie/sax plus énergique mais toujours avec retenue. Les tambours chantent et lui aussi. Steve Swallow vient s’intercaler entre les deux, tranquille et efficace. Ca joue, nom de Zeus ! Fin claire et nette.

Solo de basse pour commencer. Léger et sautillant. Adam Nussbaum joue des claquettes sur ses tambours avec les balais. Le chant joyeux du saxophone les rejoint. Le batteur est passé aux baguettes. Faut que ça brille et que ça scintille. Beau duel sax/batterie. Ils se rendent coup pour coup, en gentlement corrects mais virils. Fin en un éclair

C’étaient « Days of old » (Nussbaum), « Here comes everybody » (Swallow), « Playing in Traffic » (Nussbaum).

A suivre « Quiet inside » (Tahor) puis « Thingin » de Lee Konitz revisité par Tahor, sahcnat que « Thingin » est basé sur un standard « All the things you are ». A écouter « Thingin " titre album de Lee Konitz enregistré en concert en Suisse (album publié par le label helvétique Hat Hut).

Comme son titre le laissait supposer « Quiet inside » est une ballade. Le batteur est aux baguettes. La musique serpente, se love au soleil, paresseuse et colorée comme un lézard. Adam Nussbaum est passé aux balais. Steve Swallow se promène sur le thème. Adma le fait monter en neige et Ohad écoute les deux vieux Maîtres ponctuant avec des notes volant comme des papillons. Ils glissent sur le parquet ciré d’un palais.

Le « Thingin » est plus viril, plus dynamique que la version de Lee Konitz. La balle circule bien entre les trois joueurs. Elle ne retombe jamais. Adma Nuusbaum envoie sec, précis, fort mais jamais assourdissant. Steve Swallow lit-il partition ou joue t-il penché pour mieux se concentrer ?

Un standard du bebop joué de façon assez free. Ca envoie. C’est énergique mais toujours sous contrôle. Dialogue subtilissime entre la basse qui chante, la batterie qui cliquète, vibre, ponctué de quelques volutes de sax ténor.

« Ohad Talmor. Remember that name » nous dit Steve Swallow. Pour finir le set « Up too late » de Swallow. Personne ne fait chanter une basse comme Steve Swallow. Il démarre en solo. La batterie relance, bien funky sur les cymbales. Debout trop tard peut-être, en forme sûrement. A l’écouter, il est évident qu’Ohad Talmor est le nouveau Wayne Marsh de Lee Konitz. Les papys déménagent sévère et le petit jeune ne s’en laisse pas conter. Solo de batterie mirobolant ponctué de relances de basse. Fin tout en relâchement.

PAUSE

Démarrage tout en douceur par un solo de basse. Les balais massent les tambours. Son de velours du saxophone. Adam passe des baguettes pour chauffer aux balais pour apaiser. Le son de la basse est rond et souple.

Morceau plus agité commencé à l’unisson. Ca interagit entre les roulements de tambours, le hachis des cymbales, le grondement de la basse et les interjections du saxophone. C’était « Carolina Moon » joué par Thelonious Monk, réarrangé par Steve Swallow.

« Accordeon » (Talmor). C’est une sorte de menuet. Steve Swallow, tranquille, pose les fondations que batteur et saxophone s’amusent à démolir. Chacun est bien dans son jeu. C’est vraimentr un grand trio. Peu de gens pour l’apprécier mais ils l’apprécient vraiment.

Le jeu se calme avec un démarrage tout en douceur, métronomique à la basse. Les cymbales vibrent, le sax se fait liquide, vaporeux. Adam tapote ses tambours de ses mains. La musique devient lunaire, stellaire, pure, aérienne. Elle irait bien dans un film de Tim Burton. Je visualise Johny Depp errant dans un cimetière sous la lune au son de cette musique. Steve Swallow fait chanter sa basse, les maillets font gronder doucement les tambours et le sax joue lazy. Bien belle berceuse. C’était « Warmer in heaven » en hommage à un saxophoniste décédé récemment (je n’ai pas capté son nom).

Le blues « Accordeon » était joué pour la première fois en concert ce soir. Steve Swallow nous invite à les suivre dans la tournée européenne pour écouter les morceaux s’améliorer ou non.

« Ups and downs » (Swallow). C’est une musique qui nous mène vers le haut même s’il lui arrive de descendre dans le grave, le sombre. Breaks de batterie très énervés, ponctués par des notes de basse posées, calmes. Une dernière claque du batteur pour la fin.

Steve Swallow et Adam Nussbaum font rouler le bon temps. Le sax ténor, solide et tranquille, s’y superpose. Ils nous propulsent avec douceur et vigueur.

Enchaînement sur un morceau rapide, funky. Basse et batterie grondent, le sax est toujours la force tranquille dans ce chaos. Le batteur s’énerve, soutenu par la basse. Retour au calme d’un souffle du sax. Ils ne lâchent pas l’affaire. Steve Swallow fait gronder, vibrer la basse mais il ne slappe jamais. A croire que sa religion le lui interdit ! Il tend à faire sonner la guitare basse plus comme une guitare que comme une basse. Curieux pour un ancien contrebassiste. Adam Nussbaum alterne le déchaînement en solitaire et un accompagnement énergique au millimètre.

Concert d’un trio magnifique et démocratique. Ohad Talmor en est le jeune leader mais il respecte ses aînés et leur laisse toute la place nécessaire. A suivre attentivement.

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N
<br /> Un trio exceptionnel! Du jazz magique, un tempo soutenu sans fracas avec des leitmotiv fluides et enchanteurs. Les variations sont géniales.<br /> <br /> <br />
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