Eddy Louiss par Emmanuel Bex

Publié le par Guillaume Lagrée

Lectrices groovy, lecteurs funky, après les souvenirs d'Eddy Louiss par mézigue et par Matthieu Marthouret, voici ceux du pianiste et organiste Emmanuel Bex. Merci à Emmanuel Bex pour ses réponses (im)pertinentes à mes questions. Nous ne nous souviendrons jamais assez d'Eddy Louiss.


Guillaume Lagrée: Que représente Eddy Louiss pour toi?

Emmanuel Bex: Eddy Louiss était pour moi une de mes deux sources d’inspirations principales, l’autre étant Bill Evans. Bill Evans m’a donné le goût du jazz, Eddy Louiss celui plus particulier de l’orgue dans le jazz.
Il était un des musiciens les plus emblématiques de ce que la France a donné au Jazz. Je me dis, qu’il a , avec d’autres, mais très peu, permis à cette musique de tenir le choc des années 70, années qui auraient pu la voir sombrer sous le poids de la pop, de la musique commerciale et de tous les trucs ennuyeux….On lui doit tous une fière chandelle!


GL: Quelle influence a eu sa musique sur la tienne?

EB: Très déterminante. Sans lui , je n’aurais pas ressenti la force, l’engagement, l’humanité de la phrase musicale.

GL: Comment était l’homme?
EB: Je le connaissais très peu, nos rapports ont été très distants, sans que je sache pourquoi…. Question de génération sans doute, et de manière différente d’être avec les autres. Je l’ai toujours regretté, et je lui ai envoyé un email deux mois avant sa disparition, où je lui proposais que l’on se connaisse mieux, dans la grande aventure humaine et musicale du jazz. Je n’ai pas eu de réponse, et bien sûr il a disparu subitement.

GL: Quelles oeuvres de lui recommanderais tu à ceux qui ne le connaissent pas?
EB: Ses deux disques majeurs sont pour moi, " Dynasty " sous le nom de Stan Getz, où même s’il n’est pas leader formellement, il est le pivot de la musique du quartette. L’autre disque est la suite « Porgy & Bess " avec les arrangements d’Ivan Jullien. Un chef d’oeuvre tout à fait baroque et créatif.

GL: Qu'as tu appris d'Eddy Louiss?
EB: La beauté de la simplicité , de l’efficacité.

GL: T'a t-il donné des conseils, des leçons d'orgue Hammond ou l'as tu simplement écouté attentivement?
EB: Le seul conseil qu’il m’ait donné , au tout début, était l’adresse d’un magasin qui vendait des orgues Hammond sur Paris. Je m’y suis rendu, le magasin était fermé depuis 5 ans. j’ai donc dû me débrouiller tout seul. Mais , au fond , je crois que c’est une pédagogie efficace!

GL: As tu joué sa musique?
EB: Je l'ai étudiée, mais je n’ai jamais joué un de ses morceaux en public. Je joue par contre de temps en temps, quand j’ai envie de faire chanter le public, une petite chanson toute simple de son père, Pierre Louiss.

GL:Que tu l'aies joué ou non: pourquoi?
EB: J’avais à construire mon propre discours, et c'eût été une très mauvaise idée de coller trop fortement à son personnage. Je sais qu’il faut aimer les musiciens, mais qu’il faut garder de la distance.

GL: Quelle différence entre Eddy Louiss et les organistes américains de Jazz? Il ne sonnait pas comme Jimmy Smith, c'est certain et pourtant il groovait.
EB: Eddy Louiss était plus qu’un organiste. Il a « inventé « une musique autour de son orgue, quand la plupart des organistes de jazz américains sont dans la figure imposée par ce qu’ils croient être leur histoire.
Mais le jazz ne devient intéressant que quand il porte une universalité. C’était tellement le cas avec ce musicien. Il groovait en plus , bien sûr, ça il n’y pas de problèmes là dessus!

La photographie d'Emmanuel Bex est l'oeuvre de l'Organique Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Emmanuel Bex par Juan Carlos HERNANDEZ

Emmanuel Bex par Juan Carlos HERNANDEZ

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