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Ronnie Lynn Patterson Quartet fête la Musique

Publié le par Guillaume Lagrée

Ronnie Lynn Patterson Quartet

Fête de la Musique

Mona Bismarck American Center.

Paris. Mardi 21 juin 2016. 19h.

Ronnie Lynn Patterson: piano

Joe Sanders: contrebasse

John Betsch: batterie

Kevin Davy: trompette, bugle

Le jeu est plus classique que je ne le supposais mais le quartet envoie de bonnes vagues de musique. Enfin classique dans le genre du dernier quartet acoustique de Miles Davis en 1967. Libre et structuré. Concert sur une terrasse couverte. Les spectateurs les mieux avisés sont en face d'eux sur la terrasse. Des prudents comme le jars se trouvent dans le salon aux fenêtres grandes ouvertes. Des braves écoutent depuis le jardin se couvrant d'une pluie fine. En effet, pour respecter une tradition parisienne remontant à 1982, il pleut pour la Fête de la Musique. Le Jazz étant l'apport majeur des Etats Unis d'Amérique à la culture mondiale, il est normal que le Mona Bismarck American Center lui fasse place ce soir. En tout, 200 personnes d'après les organisateurs. Je ne dispose pas du décompte de la police pour cette manifestation légalement autorisée.

Un air dansant, un poco latino joué par la rythmique alors que le trompettiste joue de subtiles variations avec sa sourdine Harmon sans copier Miles Davis. Excellente vibration. Je bats la mesure du pied. Le quartet donne de la couleur à cette soirée grise de pluie. Le batteur tapote aux baguettes, le contrebassiste pose le tempo, le pianiste brode élégamment. Tout va bien. Le public est réservé ou trop habitué aux concerts classiques. Il n'applaudit qu'à la fin des morceaux. Bons breaks de batterie portés par le piano et la contrebasse. Le trompettiste a enlevé la sourdine et joue brillant avec brio. Quel feeling, nom de Zeus!

Un standard du Be Bop dont le titre m'échappe. Qu'est ce que ça swingue! Ca fait du bien d'entendre du bon Jazz. Premier solo de contrebasse bien chantant dans les graves ponctué par le batteur aux balais. Je ne le vois pas mais j'entends le contrebassiste chanter avec sa contrebasse. La rythmique enchaîne, toujours claire. Ancrée dans le Blues mais sans que cela pèse. Solo de batterie aux baguettes. Ca danse sec. Le batteur baisse le son pour dialoguer avec la contrebasse puis le quartet reprend pour un final groupé.

Le quartet a donc joué " Solar " (Miles Davis), " Star Eyes " et " Straight no chaser " (Thelonious Monk).

Le pianiste se lance seul dans un style marqué par Claude Debussy. Cela devient plus rythmique avec l'arrivée du groupe. Même quand ils jouent une ballade, ils swinguent. Des vrais Jazzmen! Ca m'évoque la Mer par temps calme, légèrement agitée par une douce brise, quelques nuages pour ponctuer le décor. Dehors, il ne pleut plus. Magie de la musique. Ca respire, ondule. Quelles grandes délices!

Solo de piano heurté avec subtilité. La trompette le rejoint. Ca c'est un thème joué par Miles Davis. Ca touche en plein coeur. Batteur aux balais et la rythmique enchaîne. Ajout de la sourdine Harmon à la trompette alors que la rythmique suit souplement. Stella by starlight bien sûr! Cela évoque Miles Davis et Chet Baker mais sans copie. Crescendo final.

PAUSE

J'en profite pour savourer un hamburger et un soda. C'est l'Amérique.

Le quartet repart avec What is this thing called love? joué joyeusement et énergiquement. Breaks de batterie secs et précis aux baguettes sur les tambours. Ca swingue dur, nom de Zeus!

Un morceau de Thelonious Sphere Monk mais rapide. Heurté, sautillant comme il se doit. Le cens culturel fonctionne. Le concert est gratuit, en accès libre sans réservation mais il s'agit d'un concert de Jazz dans un hôtel particulier du XVIe arrondissement de Paris. Le public est gentryfié comme disent les époux Pinçon-Charlot, sociologues de la grande bourgeoisie. Beau dialogue contrebasse-batterie. Quelle pulsation, sapristi!

Solo de piano pour introduire une ballade. Le batteur est aux balais. Ca masse le cerveau. Le titre m'échappe mais c'est bien joué. Beau solo de contrebasse, profond, au centre de la rythmique. Joe Sanders chantonne. C'est charmant. Le pianiste reprend la main avec grâce. Nouveau solo de contrebasse. Deux belles femmes se lèvent pour admirer le contrebassiste à l'oeuvre. Le trompettiste n'a pas joué ce morceau.

Il se remet à l'oeuvre justement. Un standard du Be Bop. Ca swingue toujours. Il ne reste plus q'une grande et belle femme debout qui bat la mesure du pied au rythme du solo de Joe Sanders qui chantonne de nouveau. Subtile ponctuation du bassiste et du batteur aux balais. Heureusement que c'est une belle femme car elle me bouche le peu de vue que j'avais sur les musiciens. Seule la trompette dépasse de son épaule. Je ne le vois pas mais il me semble entendre un deuxième trompettiste. Fin surprise. Pas de bis.

La musique fut bien fêtée ce mardi 21 juin 2016 au Mona Bismarck American Center à Paris par le quartet de Ronnie Lynn Patterson. Merci pour les souvenirs.

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Tenue de soirée pour Billie Holiday

Publié le par Guillaume Lagrée

Tenue de soirée pour Billie Holiday

Festival " Jazz et Images "

Cinéma Le Balzac. Paris.

Vendredi 17 juin 2016. 20h30.

Après Daniel Humair, Stan Getz, Duke Ellington et Aldo Romano, le premier festival " Jazz et images " au cinéma Le Balzac se clôt par un hommage à Lady Day, alias Billie Holiday.

La programmation cinématogaphique et le concert qui le précédait étaient assurés par le saxophoniste Vincent Le Quang.

Pour la première fois en 5 soirées, je me suis ennuyé.

Le leader avait décidé de rendre hommage à Billie Holiday sans chanteuse car Lady Day est inimitable. Le point de vue est défendable.

Le groupe était constitué d'un trio Jazz

Vincent Le Quang: saxophones ténor et soprano, compositions

Bruno Ruder: piano

Guido Zorn: contrebasse

et du Quatuor Eleanora

Elsa Moatti: violon

Thomas Lefort: violon

Hélène Hadjiyiassemis: violon alto

Eric Tinkerhess: violoncelle

Il est vrai que Billie Holiday a enregistré avec des cordes mais ça sonne sirupeux (album " Lady in Satin " pour les amateurs de sucreries)

Comme disait un Jazzman de son époque;

" Quand Ella Fitzgerald chante " My man's gone now " vous vous dites que le gars est parti acheter des cigarettes mais quand Billie Holiday le chante, vous voyez le gars dans la rue avec ses valises et vous savez qu'il ne reviendra jamais. "

C'est le genre d'émotion que procure l'écoute de Billie Holiday. Avec ce projet à cordes, nous n'avons eu qu'une musique polie, blanchie et affadie. Le président Jacques Chirac avait une expression pour qualifier ce genre de spectacle. Je m'abstiendrai de l'écrire ici.

Le film " Lady Billie Holiday " date de 1960 et est l'oeuvre de Frédéric Rossif et François Chalais.

Le film, en noir et blanc, raconte la vie de Billie Holiday (1915-1959), nous la fait voir et entendre et se termine par une séance très émouvante.

A Paris, dans un club de Jazz, des musiciens et une chanteuse sont réunis pour nous raconter et nous jouer leurs souvenirs de Billie Holiday.

A chaque mot, à chaque solo, Billie est là. Parmi ces musiciens Kenny Clarke, l'inventeur de la batterie be bop, qui joue intelligemment avec un sourire idiot, ce qui est bien préférable à l'inverse pour l'auditeur.

L'influence de Billie Holiday perdure. Il suffit d'écouter Amy Winehouse et Lady Gaga pour s'en convaincre.

La 2e édition du festival Jazz et Images devrait avoir lieu au cinéma Le Balzac à Paris de février à juin 2017.

Si les Dieux et les Muses me le permettent, j'y serai.

La vidéo ci-dessous est mal intitulée. Il s'agit bien entendu de " Fine and Mellow " dans une séance de 1957 pour CBS où Lady Day est entourée de la fine fleur du saxophone dont son ami Prez alias Lester Young au saxophone ténor.

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Sélection de festivals de Jazz pour l'été 2016

Publié le par Guillaume Lagrée

Lectrices vertueuses, lecteurs civiques, en accord avec les dieux et les muses, voici ma sélection de festivals de Jazz pour l'été 2016.

Pour un agenda exhaustif, voyez mes anciens collègues de Citizenjazz.

Jazz en ville:

si vous êtes à Paris et voulez écouter du Jazz au vert, le Paris Jazz festival se poursuit au Parc floral de Paris (métro Château de Vincennes) jusqu'au lundi 31 juillet. Entrée du parc à 6€, concerts gratuits. Emmenez femmes, hommes, enfants, voisins, parents, prévoyez le pique nique et les jeux.

si vous êtes à Paris et ne voulez ou ne pouvez aller à New York, deux solutions s'offrent à vous:

- le festival " Nous n'irons pas à New York " au Duc des Lombards en juillet et août

- l'American Jazz Festiv'Halles au Sunset-Sunside en juillet suivi du festival Pianissimo en août consacré au piano comme son titre l'indique.

- le festival All Stars au New Morning jusqu'au mercredi 3 août.

A Paris, toujours, une pianiste compositrice leader née Leila Olivesi et son quintet Utopia au Petit Journal Montparnasse samedi 2 juillet à 21h30. Une Dame du temps présent qui fait oublier celles du temps jadis.

si vous êtes à New York et voulez écouter du Jazz gratis dans la rue ou à Central Park, Jazz Mobile, y pourvoit depuis 50 ans sans défaillir.

A Montpellier en Occitanie, le festival de Radio France et de Montpellier donnera carte blanche au pianiste franco-américain Dan Tepfer, maintes fois célébré sur ce blog, avec un concert Carte blanche le mardi 19 juillet à 22h. Entrée libre. S'il n'y a plus de place pour vous ou que vous ne pouvez être à Montpellier, pas de panique. Le concert est diffusé en direct sur France Musique.

si vous êtes à Nantes et voulez vous promener au bord de l'eau, rendez-vous de l'Erdre du 25 au 28 août. A noter Omar Sosa et son Creole Sextet ainsi que mes amis d'EOTH et leur jazz rock cosmi-comique. Tous les concerts sont gratuits.

si vous êtes à Genève et voulez aller au parc, rendez-vous au parc des Cropettes du 29 juin au 3 juillet pour le festival de l'AMR. Tous les concerts sont gratuits.

si vous êtes à Besançon et voulez stimuler vos neurones, allez au 35e festival Jazz et Musiques improvisées du 28 juin au 2 juillet avec notamment le double dames vocal Equivoxe composé de Claudia Solal & Valérie Phillipin le mardi 28 juin à 21h au Grand Kursaal.

si vous êtes à Paris et voulez finir l'été en beauté, allez au Festival Jazz à la Villette du 30 août au 11 septembre avec des concerts pour les petits et les grands et du cinéma.

Jazz à la montagne:

A Chamonix Mont Blanc, dans les Alpes, en France, le Cosmo Jazz Festival emmène le Jazz aux alpages pour l'estive du 23 au 31 juillet. Lundi 25 juillet à 12h, sur l'alpage de Lorioz, Elina Duni viendra seule avec sa guitare et ses percussions chanter les montagnes d'Albanie face aux Alpes. Le concert est gratuit mais il faut marcher pour y accéder. Prévoyez le pique nique et une tenue adaptée à la montagne.

A Merano, en Italie, au pied des Dolomites, suivez le Maestro Franco d'Andrea avec le Merano Jazz Festival (festival et académie) du 13 au 17 juiilet.

A Montreux en Suisse, avec le Jura derrière vous, le lac Léman et les Alpes face à vous, le Montreux Jazz Festival fêtera ses 50 ans en 2016. Beaucoup de Pop là dedans mais tout de même le trompettiste new New Orleans Christian Scott sera présent.

A Willisau en Suisse, le festival Jazz Willisau fêtera ses 50 ans du 31 août au 4 septembre. Le programme n'est pas encore fixé à ce jour. Affaire à suivre.

En Maurienne, en Savoie, France, le festival Cordes et pics réunira violonistes et artisans archetiers (festival, académie, concours) du 23 juillet au 6 août. Il s'agit essentiellement de musique classique mais il y a de vrais morceaux de Jazz dedans.

Jazz à la mer:

A Antibes-Juan-les-Pins, Jazz à Juan, fêtera ses 56 ans (plus vieux festival de Jazz en Europe), à la pinède Gould, face à la Mer Méditerranée, du 14 au 24 juillet avec notamment le Snob Paolo Conte. Les festivités commenceront avec les Victoires du Jazz mercredi 13 juillet présentées par Sébastien Follin sur France 3 et FIP. Parmi les nominés, Sylvain Rifflet Mechanics et Pierre Perchaud chaudement recommandé sur ce blog.

A Toulon, face à la Mer Méditerranée, le festival Jazz à Toulon se déroulera du 15 au 24 juillet. Tous les concerts sont gratuits. A noter le quartet " Oversea " d'Olivier Ker Ourio (harmonica) le 24 juillet à 18h30.

A Nice, au théâtre de verdure du Parc Masséna, le Nice Jazz Festival (jeu de mots pour les anglophones) devait avoir lieu du 16 au 20 juillet, à deux pas de la Mer Méditerranée. A noter le Becca Stevens Band louangé sur ce blog. Suite au massacre terroriste du 14 juillet sur la Promenade des anglais, le Nice Jazz Festival est annulé.

A Marseille, le festival Jazz des 5 continents, aura lieu du 20 au 29 juillet. Mardi 26 juillet à 21h Christian Scott Atunde Adjuah et sa Stretch Music vont étirer vos émotions et vos perceptions.

Sur l'île de Porquerolles, dans le parc national marin de Port Cros, entourés par la Mer Méditerranée, Jazz à Porquerolles du 8 au 12 juillet, Archie Shepp & Aldo Romano, fondateurs du festival donneront un concert spécial. Otis Taylor, le grizzli du Blues, sera aussi présent.

Dans la Manche, en Normandie, en baie du Mont Saint Michel, le festival Jazz en Baie aura lieu du 5 au 15 août avec notamment Eric Le Lann " Life on Mars " déjà louangé sur ce blog.

Toujours sur les rives de la Manche, mais côté Bretagne, en Côtes d'Armor, à Sables d'Or les Pins ( " A Sables d'Or près des dunes " chante Etienne Daho dans " Tombé pour la France "), au théâtre de verdure de la vallée de Diane, le jeudi 20 juiillet, à 21h, Eric Seva et son quartet " Nomade sonore " célébré sur ce blog (libre participation aux frais). Bon voyage.

Pour l'Océan Atlantique, rendez-vous sur l'île de Ré que chantait Claude Nougaro pour le festival Jazz au phare du 15 au 18 août avec Philip Catherine et Michel Legrand.

Pour l'Océan Atlantique encore, venez déguster Jazz y Krampouezh à Nevez, Finistère, Bretagne, qui mêle Jazz et gastronomie du pays des rias et des belons avec une soirée Jazz Création jeudi 20 juillet à partir de 18h concoctée par deux trompettistes célébrés sur ce blog: Johann Lefevre puis Eric Le Lann (avec pour invité spécial Rick Margitza au saxophone ténor).

Pour l'Océan Atlantique et le Golfe du Morbihan, festival Jazz à Vannes marrainé par la trompettiste Airelle Besson du 24 au 31 juillet. Tous les concerts sont gratuits.

Pour l'Oéan Atlantique vu de l'autre rive, rendez-vous au Newport Jazz Festival du 29 au 31 juillet.

Jazz à la campagne:

A Gomené, Morbihan, Bretagne, festival Jazz à Gomené le 1er et le 2 juillet avec mes amis d'EOTH le vendredi 1er et le Boclé Bros Keltic Band le samedi 2 juillet.

A AIgnes et Puyperoux, en Charente, le festival Respire Jazz réunira dans l'ancienne abbaye de Puyperoux (aujourd'hui centre d'hébergement collectif) du 1er au 3 juillet le duo Bojan Z & Julien Lourau et le trio de Pierre de Bethmann.

A Langourla, Côtes d'Armor, Bretagne, 21e festival Jazz in Langourla du 5 au 7 août. Un théâtre de verdure dans une ancienne carrière de pierre.

A Malguenac, Morbihan, Bretagne, festival Arts des villes, Arts des champs du 18 au 21 août avec Emmanuel Bex, Sylvain Rifflet &Mechanics notamment.

Dans le vignoble nantais, en Loire Atlantique, Pays de la Loire, Jazz, Maine et Muscadet au programme avec Jazz sur Lie. Le programme n'est pas fixé mais savourer Jazz et écrevisses de rivière sans modération accompagné de muscadet (avec modération), cela ne se refuse pas. Voici mes souvenirs de l'édition 2006 de ce festival.

La photographie d'Elina Duni est l'oeuvre de l'Imparable Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Elina Duni par Juan Carlos HERNANDEZ

Elina Duni par Juan Carlos HERNANDEZ

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Antichambre agrandit le studio de l'Ermitage

Publié le par Guillaume Lagrée

Antichambre

Studio de l’Ermitage

Paris. Mardi 14 juin 2016. 21h.

3 concerts pour le prix d’un !

I Oboman plays Cole Porter

Jean-Luc Fillon : hautbois, cor anglais

Frédéric Eymard : violon alto

Joao Paulo : piano

L’idée est de jouer Cole Porter, créateur de quelques uns des plus grands standards du Jazz, dans une formation de trio classique mais avec une liberté de jazzmen.

« I get a kick out of You ». Intro du piano à la mode romantique. Le trio démarre et joue du Jazz, " la parfaite musique de chambre de notre temps » (Jean Cocteau). Frédéric Eymard gratte son alto comme une guitare. Ca s’envole avec grâce. Solo de piano qui prépare l’entrée de l’alto. C’est bien dans l’esprit de Cole Porter, festif.

« What is this thing called love ? ». Cole Porter ne parlait que d’amour. Il était homosexuel et dut longtemps le cacher. Joué en trio dans un même élan. Solo d’alto puis de cor anglais, d’un son grave lui aussi. Bon stomp du piano et le trio revient. L’ instrumentation originale du trio permet de rafraîchir un standard archi joué tout en lui restant fidèle.

L’alto démarre entre cordes frottées et pincées. Dialogue vif et joyeux avec le piano. Ni contrebasse ni batterie mais le tempo est impeccable. Le hautbois les rejoint. Rappelons que, contrairement à la famille des saxophones, dans la famille des violons, l’alto est un grand modèle.

Solo de piano. « Just one of those things ». Un standard archi connu mais pas si facile à reconnaître avec cette instrumentation. L’amour, toujours l’amour. Beau solo de piano qui fait le pont pour relancer hautbois et alto. Deux jolies femmes s’assoient à ma table. Elles n’ont pas le choix car la salle est comble.

« Love for sale ». Un autre standard immortel de Cole Porter. Le violon alto ajoute sa gravité mais toujours dans l’élan et la grâce. Ce pianiste doit venir du classique avec un toucher pareil. Ils font grincer et chanter le thème vers le final.

II. Supplément d’âme

Jean-Philippe Viret : contrebasse, compositions, arrangements, direction

Eric Maria Couturier : violoncelle

Johan Renard : violon quinton (5 cordes)

Sébastien Surel : violon

Les cordes sont pincées du bout des doigts. Ca sonne baroque et musique de cour. Pour le Palazzo Schifanoia à Ferrare (en français, le palais qui fait honte à l'ennui, littéralement) par exemple. Tous ont repris l’archet et lisent la partition. Il ne semble pas y avoir d’improvisation. En fait si il y en avait mais je ne l'ai pas perçue. C’est encore de la musique de chambre mais ce n’est plus du Jazz. Morceau inspiré des « Idées heureuses » de François Couperin, intitulé « L’idée qu’on s’en fait ». Ce sera le titre du prochain album du quatuor « Supplément d’âme » de Jean-François Viret.

« Jour après jour » (Jean-Philippe Viret). Solo de contrebasse, lent, mat, métallique. Jean-Philippe commence à installer une pulsation donc du Jazz. Jour après jour, c’est encore l’amour. Ca swingue tout en finesse. La musique s’efface doucement, comme un songe.

Le quartet repart avec les archets. Une sorte de sarabande où la contrebasse marque le tempo en pizzicato. C’était « La muse plantine », hommage de François Couperin à Madame de Plante, fameuse musicienne de son temps.

« En un mot comme en cent » (Jean-Philippe Viret). La contrebasse est attaquée à mains nues. Bonne pulsation. Il frôle le groove. Les trois autres attaquent à l’archet. C’est sinueux, grave. Cela devient passionné voire tourmenté. Très belle pulsation finale.

III. Double Celli

Olivier Calmel : piano, compositions, direction

Xavier Philipps : violoncelle

Clément Petit : violoncelle

Frédéric Eymard : violon alto

Johan Renard : violon

Antoine Banville : batterie, percussions

Le groupe commence sans la batterie. Ca sonne très fluide. Antoine Banville se glisse très subtilement aux maillets. Ca s’anime petit à petit. Antoine est passé aux balais, toujours subtil et coloriste. C’est un vrai musicien, pas un bûcheron qui cogne. La pulsation du violoncelle en pizzicato est digne d’une contrebasse. Le piano file droit sous les doigts d’Olivier Calmel. Et hop, aux baguettes ! Les violons prennent le dessus. Passage aux percussions. Ce batteur est un homme orchestre. C’était le « Prélude des cinq rameaux d’Olivier » écrit par Roger Calmel pour la naissance de son fils, Olivier, leader ce soir.

En hommage à l’Euro de football (victoire de la Hongrie face à l’Autriche 2-0 ce soir), « Le Hongrois déraille ». Ca démarre bien dans les rails, tout le monde groupé. Le pianiste accélère. Antoine au tambourin (« Tamborine », chanson peu connue de Prince). Une sorte de danse hongroise se lance ensuite, d’abord contenue, mais prête à exploser. Antoine est passé aux percussions. Pianiste et altiste battent la mesure des mains. Puis le violoniste s’escrime joyeusement, poussé par le piano et les percussions.

Intro langoureuse entre piano et alto. Les violoncelles ajoutent du mystère. Le batteur est passé aux maillets sur les tambours. Puis il martèle à mains nues et le groupe décolle comme un seul aéronef.

Solo en pizzicato de Clément Petit. Le violoncelle sonne comme un oud. Excellente vibration. Sur un signe du violoncelliste, le pianiste ouvre le dialogue. Un autre signe de Clément et toutes les cordes vibrent sous les archets. C’est le moment des adieux émus des amants sur le pont sous la pluie. Retour de Mr Tamborine Man, alias Antoine Banville. Le pianiste lance la danse. Finalement, le soleil est revenu au dessus du pont et les amants dansent ensemble, fous de joie. Le groupe est bien lancé vers l’envoi final.

Un final orientalisant. Beau solo de violon alto alors que la rythmique pulse de façon Jazz, étonnamment. Le violoniste n’est pas en reste. Le pianiste ajoute de la tension. Tout le groupe contre le batteur qui ne se laisse pas faire. Solo intense de batteur. Et tchac ! C’est fini.

RAPPEL

Tout le monde monte sur scène y compris Joao Pinto le pianiste d'Oboman car Olivier Calmel partage la scène et son piano.

Une ballade de Jean-Philippe Viret pour commencer.

Antoine Banville distille des philtres sonores derrière les cordes. Chaque musicien entre à son tour dans la danse. Tous ensemble. C’est romantique à souhait. Parfait pour reprendre la valse des amants sur le pont.

Olivier Calmel enchaîne sur une sienne composition. C’st plus joyeux et énergique. Les biches gambadent gaiement dans les bois. Simple et efficace. Antoine Banville aux baguettes tient le tempo. Ca tourne en boucles joyeuses. Bel envoi final.

Pour vous faire votre propre idée, éblouissantes lectrices, resplendissants lecteurs, vous trouverez sous cet article une vidéo de la séance Double Celli de ce concert menée par le pianiste et compositeur Olivier Calmel.

La photographie de Jean-Philippe Viret est l'oeuvre de l'Indémodable Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Jean-Philippe Viret par Juan Carlos HERNANDEZ

Jean-Philippe Viret par Juan Carlos HERNANDEZ

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Une poule sur un piano: première à Paris au Balzac le 25 juin 2016

Publié le par Guillaume Lagrée

Lectrices duchesses, lecteurs ellingtoniens, je vous ai déjà parlé du documentaire " Une poule sur un piano " de Laurent Lukic consacré au séjour de Duke Ellington au château de Goutelas (Loire, Rhône Alpes Auvergne, France) en 1966.

Voici le synopsis de ce documentaire de 75mn par l'auteur:

Qu'est venu faire Duke Ellington en 1966 en plein coeur de la campagne forézienne? Pourquoi a-t-il été autant marqué par les trois jours qu'il a passés là-bas au point de composer une Suite et d'y consacrer un chapitre entier dans son autobiographie?

Une Poule sur un Piano raconte l'histoire d'hommes que tout semble opposer et que pourtant tout réunit autour d’un projet phare : la reconstruction du Château de Goutelas. Ouvriers, intellectuels, agriculteurs, artistes venus de toute part vont redonner vie à cette demeure qui fut un foyer de l’Humanisme depuis les guerres de religions. Alors qu’il termine une tournée européenne, Duke Ellington deviendra lui aussi un acteur important de la reconstruction de cette bâtisse tombée en désuétude. Le compositeur américain séjourne trois jours dans la région, trois jours qui sont à l'image des dix ans du renouveau de Goutelas où désintéressement, complicité et solidarité sont les points communs entre ces hommes et dont le maître-mot est le "Vivre-Ensemble". Ellington côtoie un monde à l'opposé du sien, mais auprès duquel il trouve les valeurs qui lui sont chères dont celle de la Fraternité. Goutelas devient alors pour tous un catalyseur, le symbole d'un idéal qui perdure encore aujourd'hui.

La première projection parisienne du film aura lieu le

SAMEDI 25 JUIN 2016 à 11h

au Cinéma Le BALZAC

1 rue BALZAC

75008 PARIS

FRANCE

(Métro George V, à l'angle avec l'avenue des Champs Elysées) L'entrée est gratuite pour les KissKissbankers qui ont soutenu le film, à 8€ pour les Membres de la Maison du Duke, à 10€ en tarif normal et négociable pour ceux aux moyens restreints. Afin d'assurer au mieux cet évènement qui sera suivi d'un Cocktail offert par la Maison du Duke, la réservation des places est à effectuer par mail à: laurent@colombeprod.com

La photographie de Duke Ellington au pianoforte devant le château de Goutelas est la propriété de Paris Match. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son propriétaire constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Duke Ellington au pianoforte devant le château de Goutelas

Duke Ellington au pianoforte devant le château de Goutelas

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Wayne Escoffery Quartet réjouit le Duc des Lombards

Publié le par Guillaume Lagrée

Wayne Escoffery Quartet

Paris. Le Duc des Lombards.

Samedi 11 juin 2016. 21h30.

Wayne Escoffery : saxophone ténor

Dany Grissett: piano

Ugonna Okegwo: contrebasse

Ralph Peterson: batterie

Le leader arrive de la salle en jouant. Ca swingue énergiquement tout de suite. La rythmique tourne en boucles rythmiques puissantes alors que le leader allume la flamme du Jazz. Wayne Escoffery sort de scène pour céder la place à sa rythmique. Les doigts de sorcier de Danny Grissett agitent la mixture. Batteur et bassiste ne sont pas en reste. Wayne revient faire briller le cuivre.

« Tears for Caroline » ou « of Caroline » dédié à son ex épouse. Wayne ne se souvient plus du titre car, rien que d’y penser, ça le stresse. Leur relation devait être forte. Morceau très énergique avec une grosse lame de fond qui nous emporte. Soit elle pleurait beaucoup soit elle l’a fait beaucoup pleurer. Enfin, c’est tourmenté. De nouveau, Wayne sort de scène pour laisser toute la place àç la rythmique. Danny Grissett allie une main de fer à un toucher de cristal. Batteur toujours aux baguettes. Fouette cocher. Le retour de Wayne Escoffery prouve à nouveau que son histoire avec son ex était passionnée. Pianiste et batteur jouent en sourdine pour le premier solo de contrebasse, vif, grave et précis. Ca s’apaise pour le final à quatre tout en restant agitato.

Danny Grissett et Wayne Escoffery jouent depuis 10 ans avec Tom Harrell. Wayne explique que Tom Harell compose tant de belles mélodies que, pour certaines, il ne les joue qu’une fois (Duke Ellington faisait de même). Alors il les lui vole. Comme celle-ci que Tom Harrell n’a pas enregistré, « February ». Une ballade qui correspond bien à l’ambiance figée, gelée de février (l’hiver est une chose sérieuse à New York). Batteur avec un maillet main gauche et une baguette main droite. Ca ronronne comme le feu dans la cheminée. La musique s’agite progressivement. Ca tient chaud hiver comme été. La rythmique reprend la main. Quel p.. de pianiste ! Ca swingue avec une aisance, une fluidité. Dialogue piano contrebasse que le batteur ponctue très légèrement avecles balais sur les cymbales. C’est de la dentelle. Le sax ténor vient ajouter encore un peu plus de chaleur au foyer.

Batteur et pianiste quittent la scène. Duo sax ténor/contrebasse. Ugonna Okegwo déroule le tapis rouge pour l’entrée en scène du saxophone. Une ballade. Un standard dont le titre m’échappe. Quelle assise ! Mon correspondant nantais, Monsieur P, de passage à Paris, apprécie. Le sax se tait. Solo de contrebasse. Les cordes pincées gémissent de plaisir. Silence religieux dans la salle. Ce n’est pas de Duke Ellington mais de son alter ego Billy Strayhorn.

Une composition du batteur, jouée en quartet. C’est bien plus agité. Après du Billy Strayhorn, cela paraît bien lourd.

Une composition de Wayne Escoffery. Energique. La musique couvre la clameur des supporters anglais dans les pubs environnants. Trop démonstratif à mon goût.

RAPPEL

Le saxophoniste commence seul une ballade. Fortes prises d’appui. Le pianiste le rejoint. Personne n’applaudit. Le public est aussi concentré que les musiciens. Un standard dont le titre m’échappe. Un beau duo. Cela nettoie les tympans.

La photographie de Wayne Escoffery est l'oeuvre de l'Irréparable Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Wayne Escoffery par Juan Carlos HERNANDEZ

Wayne Escoffery par Juan Carlos HERNANDEZ

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Frédéric Borey " Lucky Dog " en concert au Pannonica à Nantes par Monsieur P

Publié le par Guillaume Lagrée

La chronique de Monsieur P

Honorables lectrices, respectables lecteurs, mon correspondant à Nantes, Monsieur P, est revenu au Pannonica pour un nouveau concert de Frédéric Borey. Il n'a vraiment pas aimé la première partie mais alors pas du tout. Quant à la seconde partie, il a apprécié mais il préfère un autre groupe de Frédéric Borey, " The Option ". Je cède la parole à Monsieur P.

Le Pannonica

Nantes, Loire Atlantique, Pays de la Loire, France

Jeudi 21 avril 2016. 20h.

Une fois de plus, je me retrouve au Pannonica, salle bien appréciée des amateurs de jazz à Nantes, Édouard Ravelomanantsoa (piano) en première partie. Frédéric Borey, Yoann Loustalot « Lucky Dog » dans un second temps

Après les présentations d’usage, le concert commence donc avec la prestation d’Édouard Ravelomanantsoa et ça commence fort, pas de bonjour quand l’artiste entre sur scène , est ce la malédiction des musiciens solo que de manquer d’éducation à ce point, il a beau avoir accepté humblement de jouer le jeu du piano solo, un peu d’éducation n’a jamais tué personne et ça commence par dire bonsoir au public qui a fait l’effort de se déplacer.

Le jeu est fluide, il semble habité par sa musique , il passe du très doux au très rythmé comme un coureur cycliste passe de la plaine à la montagne , cela me plaît bien mais est-ce encore du jazz, ça ne swingue pas trop voire pas du tout. J’ai l’impression de voir un clone de Guillaume Viltard , un morceau , un bref arrêt, pas de commentaire , pas de nom de morceau, pas d’explications, pas de complicité avec la salle, c’est sans doute trop demander . Pourtant ça s’écoute bien et c’est même agréable, mais que d’efforts à faire au niveau de la communication.

J’ai l’impression d’écouter Richard Clayderman mais lui n’avait la prétention de se revendiquer jazzman, puis soudain un passage plus jazzy mais le constat est clair, encore un musicien qui ne sait que s’écouter. Ce genre de muscien devrait être invité à rester chez lui car ce n'est pas la peine de déplacer des amateurs de musique si c'est pour se croire seul sur la planéte.

Le set allait se terminer quand soudain par miracle Édouard Ravelamanantsoa retrouva le sens de la parole , il dit bonsoir ( il était temps) et s’excusa de ne avoir présenté son œuvre avant . Il lança un « Je vous aime » mais est-ce réciproque, pas vraiment dans mon cas. Il remercie le Pannonica pour l’invitation et il joue un dernier morceau créé pour l’occasion. Il s’éclipse comme il était venu, sans dire au revoir.

Le public applaudit poliment mais moi j’ai plutôt envie de pousser un ouf de soulagement car si ce n’est pas une musique désagréable, pour moi ce set aurait plus sa place à la salle Pleyel que dans une salle de jazz. La mi temps arrive et je me dirige vers le bar pôur boire une bière et partager quelques impressions avec quelques spectateurs. Cela me rassure car je ne suis pas le seul à trouver que ce n’est pas vraiment pas du jazz.

Le second groupe " Lucky Dog " arrive avec la composition suivante :

Frédéric Borey: saxophones,

Yoann Loustalot: trompette, bugle

Yoni Zolnik: contrebasse

Frédéric Pasqua: à la batterie.

Les morceaux s’enchaînent et je constate que c’est un jazz très tonique avec des roulements de batterie notamment, quelques titres " Jacky’s method ", " Faits divers " . Pas de doute, c’est du jazz très contemporain , mais entre deux morceaux il y a beaucoup d’humour, je préfére ce second set au premier , il y a des passages qui alternent solo de contrebasse avec des solos de batterie, des moments tres rythmés avec des passages plus calmes . Un solo de saxophone , c’est fluide , ça coule tout seul, je passe un très bon moment, on entend des cloches comme pour annoncer le passage d’un train à un passage à niveau. Mes notes se sont dispersées un peu mais j’apprécie ce set avec un solo de batterie reprenant comme un cœur qui bat.

Par rapport au premier set, c’est vraiment du jazz et il y a une complicité avec la salle.

Le set s’achève et j’échange quelque mots avec Frédéric Borey que j’avais déjà vu pour « The option ». Bien sûr ce concert n’a rien à voir avec « The option » mais je ne suis pas déçu et j’arrive même à plaisanter avec Frédéric Borey sur cette manie qu’ont les responsables du Pannonica de passer en première partie des ours comme Guillaume Viltard ou Édouard Ravelomanantsoa. Depuis j’ai eu l’occasion de revenir au Pannonica mais pour un concert plus « old school » qui fera l’objet d’une prochaine chronique.

La photographie de Frédéric Borey est l'oeuvre de l'Irréversible Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Frédéric Borey par Juan Carlos HERNANDEZ

Frédéric Borey par Juan Carlos HERNANDEZ

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Fred Hersch Trio émeut le Duc des Lombards

Publié le par Guillaume Lagrée

Fred Hersch Trio

Paris. Le Duc des Lombards.

Mardi 31 mai 2016. 19h30.

Fred Hersch : piano

John Hebert: contrebasse

Eric Mac Pherson: batterie

François Lacharme, président de l’Académie du Jazz, remet à Fred Hersch le Grand prix pour son album “ Solo “(2015). Selon le quotidien londonien The Guardian, Fred Hersch est un pianiste « criminellement sous-estimé ».

L’enchantement commence dès les premières notes de piano. Dieux, que c’est souple ! Bassiste et batteur le rejoignent dans le même mouvement. Salle comble remplie de professionnels de la profession (musiciens, critiques, producteurs). Ca swingue souplement et élégamment et ça touche en plein cœur. Le pianiste mène la danse mais dans un mouvement parfaitement synchronisé avec ses partenaires. Ca monte en puissance imperceptiblement jusqu’au final.

« Forerunner » (Ornette Coleman), morceau joué sans pianiste sur l’album « The change of the century ». Je retrouve l’acidité et l’étrangeté d’Ornette Coleman mais adoucies sous les mains de Fred Hersch. La contrebasse prend la main, rapide, précise. La batterie cliquète sous les baguettes. Ca danse, sautille comme il convient pour la musique d’Ornette.

Première ballade. Le toucher de Fred Hersch me cloue sur place. L’essence de l’émotion se dévoile sous ses doigts. « I fall in love too easily » et ça sent le vécu (« I fall in love too easily, I fall in love too fast, I fall in love too terribly hard for love to ever last “). Non seulement, Fred Hersch est un des rares Jazzmen à assumer publiquement son homosexualité mais en plus, il est séropositif depuis 30 ans. Batteur aux balais. Solo de contrebasse au milieu du trio. La vague avance doucement dans un subtil balancement.

« Self include ». Nouvelle composition. Solo du batteur aux baguettes pour commencer, léger, vif, précis. La contrebasse et le piano s’ajoutent. Solo de contrebasse avec le batteur qui malaxe aux balais. Que de bonnes vibrations pour les spectateurs !

Une nouvelle composition « Begin again ». Un souffle de vie soulève la musique. La grâce en mouvement fait toujours du bien à l’âme.

Solo de piano vite rejoint par les deux autres. Un standard joué avec légèreté et vie mais toujours avec une pointe de nostalgie. Je ne retrouve pas le titre car mon écoute est perturbée par les mangeailles, beuveries et bavardages de Pierre de Chocqueuse, secrétaire général de l'Académie du Jazz et de sa bande d’ Anciens. Si l’Académie du Jazz ne respecte plus les Jazzmen à l’œuvre, où allons nous ?

Le pianiste part seul en ballade. Il a installé une telle ambiance que personne ne l’applaudit quand le trio enchaîne. C’est « Moon and Sand », chanté par Chet Baker notamment. Nous sommes sur une balancelle, pas sur une balançoire.

« Mood Indigo » (Duke Ellington) lancé seul au piano. Batteur aux balais. Le temps s’étire doucement.

Enchaînement direct sur un standard de Thelonious Monk. D’Ellington à Monk, il y a une filiation. Cf l’album « Thelonious Monk plays Duke Ellington », en trio justement. Toujours le Blues mais plus agité, plus heurté.

RAPPEL

Contrebassiste et batteur sont partis dîner. Fred Hersch revient seul sur scène pour nous jouer une ballade de sa composition. Cela ressemble à une aurore sur les collines de Bourgogne au printemps. Tout est doux, d’un ton pastel. Nous hésitons avant d’oser applaudir.

Voici le podcast de ce concert grâce à la radio TSF Jazz. Merci à elle.

La photographie de Fred Hersch est l'oeuvre de l'Irrépressible Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Fred Hersch par Juan Carlos HERNANDEZ

Fred Hersch par Juan Carlos HERNANDEZ

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Nik Bärtsch's Mobile captive le Festival Jazz à Saint Germain des Prés

Publié le par Guillaume Lagrée

Festival Jazz à Saint Germain des Prés

Paris. Maison des Océans

Samedi 21 mai 2016. 21h.

Nik Bärtsch’s Mobile

Nik Bärtsch : piano

Sha: clarinette basse et contrebasse

Nicolas Stocker: percussions

Kaspar Rast : batterie

Lectrices éveillées, lecteurs guetteurs, mes notes, prises sur le vif, étant illisibles, je vais résumer les impressions qu’a suscité ce concert en moi.

Après avoir été émerveillé par l’album du Nik Bärtsch’s Mobile, je découvre ce quartet helvète sur scène dans le cadre du Festival Jazz à Saint Germain des Prés.

Le prince Albert 1er de Monaco a créé la Maison des Océans vouée à l’étude et à l’amour de la mer. Cela se voit. Nous sommes dans un grand amphithéâtre 1900 tout en bois avec des fresques murales et morales à la gloire des marins et des capitaines partis joyeux pour des courses lointaines. La Science Belle Epoque dans toute sa majesté.

Je reconnais le style si particulier de cette musique dès les premières notes. Le quartet joue sur l’obsession et la répétition mais sans l’ennui et l’emphase que dégagent Keith Jarrett. Scéniquement, il semble qu’un rite religieux se déroule tant les gestes sont lents et mesurés. La salle est comble ce qui est réjouissant pour une musique aussi exigeante.

Sans électronique, les musiciens jouent des boucles rythmiques, des plages sonores qui produisent une musique abstraite et pourtant sensuelle. Le silence est total dans la salle. Même pas une toux. C’est dire l’effet de ce rite esthétique.

Il n’y a pas de morceau, pas de pause, pas d’applaudissements. Tout est à prendre d’un bloc.

Ca marche. Je n’ai vu à la fin du concert que 3 têtes blanches partir déçues. La salle était comble et le public comblé a réclamé un rappel. Nik Bärtsch en a profité pour expliquer en français, avec l’accent suisse alémanique, sa démarche artistique, celle que les 3 Anciens n’avaient pas comprise manifestement. La musique se joue en modules, comme un jeu mathématique, où la liberté naît de la contrainte que les musiciens s’imposent. Moi qui n’ai pas du tout l’esprit mathématique, j’aime cette musique. Elle n’est donc pas inaccessible.

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Soirée Aldo Romano au cinéma Le Balzac à Paris

Publié le par Guillaume Lagrée

Festival Jazz et Images

Cinéma Le Balzac. Paris.

Vendredi 20 mai 2016. 20h30

Soirée Aldo Romano

Concert du trio

Aldo Romano : batterie

Henri Texier : contrebasse

Vincent Le Quang : saxophones ténor et soprano

Puis projection du film « Appunti per un film sul Jazz » ( Gianni Amico, 1965, tourné au VIIe festival international de Jazz de Bologne avec Aldo Romano, Jean-François Jenny-Clark, Mal Waldron, Steve Lacy, Don Cherry, Gato Barbieri, Johnny Griffin).

Concert du trio d’Aldo Romano

Sax ténor pour commencer. Batteur aux maillets. Son profond de la contrebasse. Ambiance de polar. Le héros sombre, dans la nuit solitaire, sous une pluie fine. Aldo passe aux baguettes et Henri à un son plus clair. Ca marche souplement, à pas de chat. Quel moelleux dans la descente du ténor ! Quelle vibration de la contrebasse ! Maître Texier sur sa contrebasse penché . Aldo Romano revient aux balais pour malaxer la pâte sonore. J’ondule avec eux, assis sur mon siège. L’esprit de la danse est bien là. C’est de l’improvisation. Ils changent d’air en cours de route. Tout s’enchaîne et nous les suivons attentifs, en silence. Ils marchent l’amble. Premier solo du batteur, en finesse, aux baguettes. Le jeu minimaliste et poétique d’Aldo Romano est bien en place.

Le trio repart sur un autre air, chantant et dansant, avec un voile de mélancolie, bref tout ce qu’il faut pour réjouir les mélomanes. Après un solo pensif du sax, le trio repart à bloc. Ca dépote. Tchac! Quelques secondes de solo de batterie pour conclure.

Sax soprano. Son délicat du sax au dessus de la vague puissante de la rythmique. Ca chante vraiment. Il me semble reconnaître un air d’un magnifique album d’Henri Texier « An Indian’s week ».

Retour au ténor. Après un solo d’intro, contrebasse et batterie entrent dans la danse. Le sax grogne, la contrebasse ronronne alors que la batteur, aux baguettes, lâche les chevaux.

Ténor toujours. La contrebasse lance le débat. Je ferme les yeux et pars avec eux. Poussé par les deux grands Anciens, le jeune Vincent Le Quang se dépasse. Quelle vibration ! Sax soprano en résonnance avec les cordes délicatement pincées de la contrebasse. Aldo suggère du bout des baguettes, sur les bords des caisses. La musica è bella e libera. Evviva Aldo Romano !

RAPPEL

Aldo commence une marche militaire aux baguettes et en martelant du pied la grosse caisse. Pulsation puissante de la contrebasse. Son léger, aérien du soprano. Un autre petit air libre et dansant pour finir.

Vincent Le Quang explique la philosophie de cette musique, qui vient du Free Jazz des années 60. La mélodie se crée dans l’interaction de l’instant présent.

« Appunti per un film sul Jazz » (Gianni Amico, 1965)

C’était le premier voyage en Italie, pour jouer, d’Aldo Romano, maçon italien devenu batteur.

Le film de Gianni Amico est une série de saynètes tournées lors du 7e festival international de Jazz à Bologne. Paris et New York se retrouvent en Italie.

Cela commence avec l’arrivée en gare du train des musiciens. Don Cherry est heureux de retrouver le soleil de l’Italie deux ans après sa tournée avec Sonny Rollins. Il est possédé par la musique.

Steve Lacy répète en studio, du Monk forcément. « Round about midnight ».

Don Cherry, concentré, attend pour jouer de sa trompette de poche. Il monte sur scène pour retrouver Aldo Romano et Jean-François Jenny Clark pour jouer du Monk, bien sûr.

Steve Lacy explique que le Jazz est pour lui ce qui remplit le temps et réunit les gens. Il joue Monk depuis des années parce qu’il aime sa musique et qu’il est le seul à le faire. Aujourd’hui, tous les Jazzmen jouent Monk et Steve Lacy y a contribué.

Sur scène, Steve Lacy, Don Cherry, Karl Berger, Jean François Jenny-Clark et Aldo Romano jouent « Epistrophy » de Monk, évidemment. Felici Bolognesi ! Merci à Gianni Amico d’avoir fixé ce moment.

Dans les rues de Bologne, Mal Waldron explique sa peine après la mort de Malcom X et son soutien aux Black Panthers même s’il n’en fait pas partie. Le Jazz est pour lui une façon de protester contre les dures conditions de vie en Amérique, conditions qui n’existent pas en Europe.

Sur scène, Mal Waldron joue « Take five » de Dave Brubeck qu’il déconstruit, martèle, noircit jusqu’à en faire un Blues contestataire.

Annie Ross du trio Lambert, Hendricks and Ross, scatte avec un complice sur « Moanin » (Horace Silver). Un concentré de Swing.

Johnny Griffin rigolard à la fête foraine puis sérieux sur scène mais toujours rapide.

Gato Barbieri a déjà les lunettes mais pas encore le chapeau. Il entretient son saxophone ténor comme un fusilier commando son fusil.

Gato Barbieri a remplacé Steve Lacy dans le quintette de Don Cherry. La musique est belle et étrange. Les musiciens sont tous en costume cravate mais ils ne font pas une musique de bureaucrates. C’est tellement plus libre que le rock’n roll de la même époque !

Ted Curson (trompette) explique que la musique est sa liberté d’expression. Avec Gato Barbieri, il joue un hommage à Eric Dolphy, mort en 1964, avec qui il jouait chez Charles Mingus. Poignant.

Pour ces musiciens, le Jazz n’était pas un exercice de style mais une question de vie ou de mort, comme le football pour Diego Armando Maradona.

Pour vous faire votre propre idée de " Appunti per un film sul Jazz " le voici en lien vidéo sous cet article, respectables lectrices, honorables lecteurs.

Dernière séance du festival Jazz et Images le vendedi 17 juin 2016 à 20h30 au Cinéma Le Balzac, à Paris: soirée Billie Holiday avec le film " Lady Billie Holiday " (Frédéric Rossif et François Chalais, 1960, 30') et une création de Vincent Le Quang " Derniers souffles pour Billie Holiday ".

La photographie d'Aldo Romano est l'oeuvre de l'Irréductible Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Aldo Romano par Juan Carlos HERNANDEZ

Aldo Romano par Juan Carlos HERNANDEZ

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