Nico Morelli Trio au Bab Ilo
Nico Morelli Trio
Paris. Le Bab Ilo.
Vendredi 28 août 2015. 20h30.
Nico Morelli : piano
Tom Mac Kenzie : contrebasse
Brian Carter : batterie
Invitée :
Tiphaine Fauchois : ngoni, chant
« Bye bye Blackbird ». Un standard célébrissime. C’est le titre de l’album que Keith Jarrett a enregistré en trio pour rendre hommage à Miles Davis, après sa mort, en 1991. Le seul album de ce trio qui dégage de l’émotion. Le piano droit du Bab Ilo sonne comme il peut. Le bassiste ne joue pas debout mais assis sur un tabouret. Le batteur est aux balais pour cette ballade. Ca sonne frais par cette chaleur. C’est l’ouvrier qui fait l’outil mais Nico Morelli mériterait un meilleur piano. Avec 20 personnes, la salle est pleine. A une dizaine, nous sommes bien. Le batteur a repris les baguettes. Ca swingue. Massé énergiquement, le piano s’est débarrassé de ses scories et sonne de mieux en mieux. Retour aux balais pour le solo de contrebasse. Le pianiste commente son solo quand une note lui plaît particulièrement. Breaks toniques du batteur, aux baguettes. Retour aux balais pour le thème joué en trio jusqu’au final.
« All Blues » (Miles Davis). La rentrée approche. Soirée révision des classiques. Ostinato de la main gauche du pianiste, vibrato de la contrebasse sous l’archet, batteur aux balais. C’est bien le thème mais il y a une recherche sonore intéressante. Le contrebassiste remplace les cuivres puis revient à la pulsation en pizzicato quand le pianiste prend la main. Ca tourne bien. Dans l’original (album « Kind of Blue » de Miles Davis) la musique est une toupie qui tourne autour d’un point fixe, la batterie de Jimmy Cobb, le seul survivant de la séance d’ailleurs.
Le piano introduit par un solo swinguant et sautillant « Lullaby of birdland ». Aussitôt la voix de la Divine Sarah Vaughan résonne en moi. Solo de batterie bien funky, sec, vif, précis.
Enchaînement immédiat sur « Night in Tunisia » (Dizzy Gillespie). Joli travail. Le public n’a même pas eu le temps d’applaudir.Ca attaque vite et fort mais sans répétition. Bref, ça swingue ! Ce standard fut composé en 1942 par Dizzy Gillespie sur le couvercle d'une poubelle d'après Art Blakey, témoin de la scène.
Arrivée de l’invitée, Tiphaine Fauchois qui joue du ngoni, instrument traditionnel africain, comme Don Cherry.
« Je suis lasse » (Tiphaine Fauchois). Les cordes de la contrebasse entrent en résonnance avec celles du ngoni. L’artiste, qui est manifestement aussi africaine que moi, a l’intelligence de ne pas jouer de façon traditionnelle. Elle crée du neuf avec un instrument ancien. La rythmique joue Jazz. Elle chante en français un texte sur la difficulté d’être créatrice. Il y a de l’espoir tout de même sinon elle ne jouerait et ne chanterait plus. « Je suis lasse et ça m’agace. Je suis lasse et ça m’angoisse. Je me déplace comme une limace ». La musique a changé d’ambiance. Le son est plus surprenant et c’est charmant. Cette demoiselle me déçoit en bien.
« Just the two of us » (Bill Withers), un classique de la Soul Music (1980). Joué ici par un trio de Jazz augmenté d’un ngoni. Musicalement, ça le fait. Vocalement, non. La voix de la chanteuse est trop blanche et trop haute pour cette chanson. Bassiste et batteur ajoutent leur voix. C’est leur culture. Ils sont à l’aise sur cette chanson.
Retour au trio Jazz pour « Les feuilles mortes » de Jacques Prévert et Vladimir Kosma (« Autumn leaves » in english), joué avec les arrangements de Michel Petrucciani. Solo de piano pour commencer. Bon feeling. Bassiste et batteur arrivent aux balais. Ca pulse puissamment comme si les battoirs de Michel Petrucciani renaissaient ce soir. Le batteur est repassé aux baguettes et ça swingue, saperlipopette ! Duo trépidant entre le contrebassiste et le batteur aux balais. Ils attisent la flamme du Jazz. Le pianiste regarde le bassiste et ponctue de temps en temps. Le batteur est de nouveau aux baguettes. La tension monte jusqu’à exploser dans le piano et les breaks de batterie. Beau bouquet final comme on dit en pyrotechnie.
Le concert est déjà fini. Un 2e concert avait lieu à 22h. Un concert au Bab Ilo coûte 10,50€ par personne, consommation comprise, soit 3 fois moins que dans les clubs de la rue des Lombards. Pour des musiciens de cette qualité, c’est donné. Evviva Nico Morelli !